La perspective d'un retour en Ukraine de Nadia Savtchenko, emprisonnée en Russie, se précisait mardi au lendemain d'un entretien entre Vladimir Poutine et Petro Porochenko sur les modalités d'un échange de prisonniers et la fin de la grève de la soif de la pilote militaire.

«Je ne dis pas que cela va se produire de manière sûre mais tout semble indiquer que nous nous dirigeons vers un échange (de Savtchenko) ces prochaines semaines», a déclaré mardi à Kiev l'un des avocats russes de la pilote, Ilia Novikov, cité par l'agence Interfax-Ukraine.

Pilote d'hélicoptère de combat, Nadia Savtchenko est incarcéré depuis l'été 2014 en Russie où elle a été condamnée en mars à 22 ans de prison pour complicité dans le meurtre de deux journalistes russes tués dans l'Est séparatiste prorusse de l'Ukraine.

L'affaire de cette femme de 34 ans, devenue héroïne nationale dans son pays, est considérée comme politique par Kiev et par les Occidentaux qui réclament sa libération.

L'hypothèse de son échange contre deux soldats russes présumés détenus en Ukraine avait été évoquée depuis des mois par l'Ukraine et les médias, mais n'a commencé à prendre forme que ces derniers jours avec la condamnation lundi à Kiev des deux hommes à 14 ans de prison pour avoir combattu du côté rebelle.

Lundi soir, quelques heures seulement après l'énoncé du verdict, les présidents russe et ukrainien ont discuté par téléphone du sort de Mme Savtchenko et de ces deux Russes, sans toutefois fournir aucun détail ni accord concret.

Mardi, le président ukrainien s'est montré plus loquace. «Il me semble que nous avons réussi à nous mettre d'accord sur une certaine procédure en vue de la libération de Nadia», a indiqué Petro Porochenko lors d'une conférence de presse à Kiev en se disant «prêt à envoyer l'avion présidentiel» pour «récupérer Nadia et la faire rentrer en Ukraine au plus vite».

La condamnation des deux Russes «ouvre certaines perspectives pour recourir à un mécanisme d'échange» de ces hommes contre Mme Savtchenko, a-t-il encore souligné sans autre précision.

Interrogé par les médias sur cet accord, le Kremlin s'est refusé à tout commentaire, réitérant tout simplement que le «destin» des prisonniers des deux bords avait été abordé.

Le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault, qui a rencontré à Moscou son homologue russe Sergueï Lavrov et Vladimir Poutine, a pour sa part indiqué avoir «évoqué le cas de Nadia Savtchenko et les préoccupations sur son état de santé».

«J'ai appelé à ce que les négociations aboutissent rapidement pour un échange de prisonniers», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse avec M. Lavrov.

Le chef de l'État ukrainien a plus tard reçu la mère et la soeur de Mme Savtchenko et s'est entretenu pour la première fois par téléphone avec la pilote, le consul ukrainien ayant été autorisé à visiter Savtchenko. 

Grève de la soif arrêtée 

«Toute l'Ukraine est fière de toi, de ta ténacité, ton courage, ta retenue et ton patriotisme!», a dit M. Porochenko pendant cette conversation, selon une vidéo diffusée par la présidence. «Nadia, tu es très brave!»

Assise à côté de lui, la mère de la pilote a également pris le combiné. «Chérie, oh mon Dieu, je suis si heureuse d'entendre ta voix», a-t-elle dit à sa fille en souriant. «Mais arrête ta grève de la faim, Nadia, tous les gens te le demandent, toute l'Ukraine», a-t-elle supplié.

«On va se voir bientôt. Tout le monde y moi-même, nous faisons confiance à notre président qui a promis de tout faire pour te ramener ici», a poursuivi cette petite femme aux cheveux gris.

Suite à l'entretien, les autorités ukrainiennes et la soeur de Nadia Savtchenko ont assuré que la pilote, qui était en grève de la faim et de la soif depuis début avril et dont l'état était «critique» selon eux, avait finalement accepté de la suspendre dans l'attente de sa libération.

Information confirmée peu après par son autre avocat, Nikolaï Polozov. «Il y a de l'espoir que ce cauchemar touche à sa fin. Nadia a recommencé à boire de l'eau», a-t-il écrit sur sa page Facebook précisant que son état ne lui permettait pas encore de recommencer à «manger de la nourriture solide».

L'échange de sa cliente ne devrait pas toutefois intervenir avant l'application du verdict des deux Russes le 18 mai.