Le vice-président américain Joe Biden a apporté lundi à Kiev le soutien des États-Unis aux autorités pro-occidentales face à «l'agression russe continue», tout en appelant à lutter contre la corruption qui gangrène l'Ukraine.

Principal responsable américain chargé du dossier ukrainien, M. Biden a sommé le Kremlin de respecter les accords de paix pour l'Est séparatiste prorusse de cette ex-république soviétique et de rendre à Kiev la Crimée annexée en 2014 au moment où le conflit syrien et la menace djihadiste relèguent la crise ukrainienne au second plan.

«Les États-Unis sont aux côtés du peuple ukrainien face à l'agression russe continue», a lancé M. Biden au cours d'un point de presse en compagnie du président ukrainien Petro Porochenko.

Les accords de paix de Minsk signés en février avec la médiation franco-allemande «ne réussiront pas si la Russie ne remplit pas ses engagements», a-t-il souligné.

Les accords de Minsk prévoient la reprise par l'Ukraine du contrôle de sa frontière avec la Russie, dont 20% (400 km) sont actuellement aux mains des séparatistes prorusses, ainsi que le retrait des soldats et des mercenaires étrangers.

Kiev et les Occidentaux accusent la Russie de soutenir militairement les rebelles de l'est de l'Ukraine et d'y avoir déployé des troupes régulières. Moscou dément toute implication militaire dans ce conflit qui a fait plus de 8000 morts depuis avril 2014.

M. Biden a en même temps pressé les Ukrainiens de mettre en oeuvre la partie des accords de paix qui leur incombe et qui consiste à procéder à une révision constitutionnelle en vue de donner davantage d'autonomie aux territoires rebelles et à organiser des élections locales dans cette zone. Ces mesures provoquent de vifs débats en Ukraine où elles sont considérées comme un moyen de légaliser de facto le séparatisme et de déstabiliser le reste du pays.

«Vous ne pouvez pas ne pas faire votre part, sinon les gens en Europe vont dire "Ils sont tous pareils"», a mis en garde M. Biden au cours d'un rencontre avec le premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk.

Le conflit dans l'Est a éclaté un mois après l'annexion par la Russie de la Crimée que le vice-président américain a qualifiée lundi de «territoire souverain de l'Ukraine dont Moscou doit «cesser l'occupation».

Malgré une accalmie relative sur le front de l'Est observée depuis septembre, «la guerre continue», a de son côté déclaré le président ukrainien, faisant état de huit soldats blessés au cours des dernières 24 heures.

«Cancer de la corruption»

Plongée dans ce conflit dont les perspectives de règlement semblent lointaines, l'Ukraine craint de voir faiblir le soutien de ses alliés occidentaux, dont certains cherchent à renouer le dialogue avec Moscou pour régler le conflit syrien.

Si M. Biden s'est employé à rassurer le gouvernement de Kiev que la crise ukrainienne n'était pas oubliée en Occident, il a déploré le manque d'efforts pour «éradiquer le cancer de la corruption» qui «freine depuis longtemps le développement du pays».

«Le peuple ukrainien ne peut pas voir encore une fois ses espoirs se dissiper», a-t-il insisté.

Dans la matinée, le vice-président s'est rendu en personne dans une rue du centre-ville pour rendre hommage aux victimes des sanglantes répressions des manifestations contre le président prorusse Viktor Ianoukovitch.

Presque deux ans après les événements du Maïdan qui s'étaient soldés par la fuite de M. Ianoukovitch, jugé très corrompu, aucun succès tangible n'a été observé concernant la lutte contre la corruption, à la grande déception des Ukrainiens mais aussi des Occidentaux dont l'aide financière est cruciale pour Kiev.

Certains, y compris dans le camp présidentiel, vont jusqu'à accuser M. Porochenko et son Premier ministre Arseni Iatseniouk de couvrir la corruption de leurs proches.

«La lassitude (des Occidentaux) face à la corruption ukrainienne atteint un niveau critique», a écrit jeudi dernier sur Facebook le député Serguiï Lechtchenko qui se trouvait alors à Washington, annonçant une «douche froide pour les corrompus au pouvoir» à l'occasion du voyage de M. Biden.