L'armée ukrainienne a promis lundi d'exhiber prochainement deux soldats présumés des forces spéciales russes capturés dans l'est de l'Ukraine, preuve, selon Kiev, de l'implication de l'armée russe dans un conflit qui a fait plus de 6200 morts depuis avril 2014.

Les deux militaires, présentés par Kiev comme le capitaine Erofeïev et le sergent Alexandrov, n'étaient pas présents lors d'une conférence convoquée d'urgence à Kiev du chef de l'État-major de l'armée ukrainienne, Viktor Moujenko, durant laquelle seule une arme appartenant aux soldats a été dévoilée à la presse.

«Lors de la capture, l'un d'eux a été blessé au bras, l'autre à la jambe (...) Ils se trouvent actuellement dans un hôpital militaire de Kiev», a précisé le chef de l'État-major.

«Je ne sais pas quand nous pourrons les montrer», a-t-il ajouté tout en invitant les représentants de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) à se rendre à l'hôpital pour s'assurer qu'il s'agissait de soldats russes.

Pour sa part, le ministère russe de la Défense a affirmé dans la soirée qu'il s'agissait de deux «anciens militaires russes». «Les citoyens russes Alexandre Alexandrov et Evgueni Erofeïev ne faisaient plus partie des forces armées russes au moment de leur capture», a déclaré le porte-parole du ministère, Igor Konachenkov, cité par l'agence publique Ria-Novosti.

«Ces gars ont en effet effectué le service militaire dans une unité de l'armée russe et ont une formation militaire», a-t-il précisé, en affirmant qu'ils faisaient l'objet de «torture» visant à les faire avouer les faits «favorables» à la version ukrainienne de l'incident.

La Russie compte que les deux hommes capturés soient «libérés le plus vite possible», a ajouté M. Konachenkov.

C'est la seconde fois que Kiev annonce publiquement la capture de soldats russes en Ukraine. En août, une dizaine de parachutistes russes avaient été faits prisonniers dans l'est.

Vladimir Poutine, qui rejette inlassablement les accusations de Kiev, de l'OTAN et des gouvernements occidentaux concernant l'appui militaire de l'armée russe dans l'Est séparatiste, avait alors affirmé que ses parachutistes s'étaient simplement «perdus» au cours d'une patrouille.

Ukrainiens, Européens et Américains ne cessent de dénoncer la présence de forces régulières russes venant en aide à la rébellion séparatiste.

Mais malgré la présence de nombreux journalistes et observateurs indépendants, aucune preuve définitive n'a pu être apportée concernant l'ampleur et la permanence du déploiement russe.

Pour sa part, la Russie a toujours catégoriquement démenti toute implication, ne concédant que celle de «volontaires» partis combattre de leur propre gré.

«C'est très important pour nous de montrer au monde entier les soldats russes, qui soi-disant ne sont pas en Ukraine», a souligné un porte-parole militaire ukrainien Vladislav Seleznev.

En Ukraine depuis mars

La capture de ces deux soldats russes près de Chtchastia, ville sous contrôle des forces gouvernementales à environ 15 km du fief séparatiste de Lougansk, avait été annoncée dimanche par le porte-parole militaire Andriï Lyssenko.

Selon Vladislav Seleznev, il s'agit de soldats de la «troisième brigade des forces spéciales, basée à Togliatti», à 800 kilomètres au sud-est de Moscou sur les rives de la Volga.

Toujours selon le responsable ukrainien, ces soldats, présents en Ukraine depuis mars, ont été arrêtés lors de combats impliquant les forces ukrainiennes et «environ 14 membres des forces spéciales» russes pour le contrôle d'un «pont stratégique». Un soldat ukrainien a été tué dans ces combats.

La vidéo de l'interrogatoire d'un de ces soldats russes présumés a été diffusée sur internet. L'homme, semblant blessé et allongé dans un lit, y dit appartenir à la «troisième brigade» de Togliatti.

Le porte-parole de M. Poutine, Dmitri Peskov, a répété qu'il n'y avait pas de soldats des forces régulières russes en Ukraine, et renvoyé vers le ministère de la Défense.

La secrétaire d'État adjointe américaine, Victoria Nuland, en visite à Moscou, a pour sa part indiqué «saluer les déclarations du gouvernement ukrainien» selon lesquelles les soldats sont «correctement pris en charge et que le Comité international de la Croix-Rouge aura accès à eux».

Des médias russes avaient exigé dès août la vérité sur la présence présumée de troupes russes en Ukraine, après l'arrestation des parachutistes et des cas d'inhumation en Russie de soldats décédés dans des circonstances floues.

Dans un rapport basé sur le travail d'enquête réalisé par l'opposant Boris Nemtsov avant son assassinat en février à Moscou, les proches de l'opposant affirment que plus de 200 soldats russes ont péri en Ukraine.

Selon le rapport, les troupes russes ont pour la première fois été envoyées «massivement» en Ukraine en août 2014, pour épauler les rebelles dans leur contre-offensive à Ilovaïsk, lieu de la bataille la plus meurtrière du conflit, et sur le front sud de Donetsk, fief séparatiste.