La loi adoptée par le Parlement ukrainien accordant davantage d'autonomie aux régions séparatistes sous condition d'élections a été rejetée mercredi par la Russie et les séparatistes, qui estiment qu'elle constitue une violation des accords de Minsk et mettent en péril le fragile processus de paix.

Selon les accords de Minsk 2, signés le 12 février, à la faveur d'une médiation du président français François Hollande et de la chancelière allemande Angela Merkel, et en présence des présidents russe Vladimir Poutine et ukrainien Petro Porochenko, une loi définissant le statut des zones contrôlées par les rebelles et leur accordant davantage d'autonomie devait être adoptée, après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu et un retrait des armes lourdes le long de la ligne de front.

Le projet de loi adopté mardi par le Parlement ukrainien dresse la liste des localités qui bénéficieront de ce «statut spécial», dont la teneur avait été adopté en septembre. Ce statut leur permet notamment de former légalement leur propre milice et de donner un statut plus favorable à la langue russe qui y est majoritairement parlée.

Mais ces localités ne pourront accéder à ce statut qu'après l'organisation d'élections locales, non seulement conforme à la loi ukrainienne, mais aussi en présence d'observateurs indépendants et après le dépôt des armes ou la départ de tous les groupes armés de ces régions. Kiev exige aussi que la diffusion des médias ukrainiens reprenne sur ces territoires.

«Kiev ne veut pas de la paix»

C'est sur l'organisation de ces nouvelles élections, elles bien prévues par Minsk 2, que Kiev et les séparatistes prorusses ne s'entendent pas.

Les rebelles prorusses dénoncent des conditions imposées par Kiev.

«Des amendements, définissant les conditions d'organisation des élections locales et qui n'ont pas été approuvés par la DNR et la LNR, ont été apportés», ont fustigé mercredi les dirigeants de la république séparatiste de Donetsk, Alexandre Zakhartchenko, et de Lougansk, Igor Plotnitski, dans une déclaration commune.

«La conclusion est claire: Kiev ne veut pas de la paix», ont encore lancé les deux leaders.

De son côté, la Russie a estimé que la loi constituait une violation «grossière» des accords de paix de Minsk. «Kiev cherche à remplacer pratiquement tous les élus du peuple par d'autres personnes», a accusé le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.

Mais les autorités de Kiev, elles, défendent la légitimité de ces amendements dans le cadre des accords de Minsk.

L'Ukraine souligne notamment que les rebelles n'avaient pas respecté les conditions prévues par la loi sur le statut spécial adoptée en septembre et qui fixait au 7 décembre l'organisation d'élections locales.

Les rebelles avaient en effet alors rejeté cette offre et organisé le 2 novembre leurs propres élections présidentielle et législatives, condamnées par Kiev et les Occidentaux, et poussant l'Ukraine à annuler la loi.

«L'adoption en 2015 de cette (même, NDLR) loi aurait légitimé les organisations terroristes de la DNR et de la LNR» et leurs élus, a déclaré le ministère ukrainien des Affaires étrangères dans un communiqué.

«La décision du Parlement permet la tenue d'élections libres et justes. (...) Les autorités nouvellement élues seront légitimes et participeront à mener des réformes constitutionnelles en Ukraine», est-il ajouté.

Un soldat ukrainien tué

Ces tensions autour du «statut spécial» des zones rebelles interviennent alors que la situation reste tendue dans l'Est, où le conflit a fait plus de 6000 morts en onze mois.

Mercredi encore, malgré l'instauration d'un nouveau cessez-le-feu il y a près d'un mois, le porte-parole militaire ukrainien Andriï Lyssenko a annoncé la mort d'un soldat ukrainien au cours des dernières 24 heures. Cinq autres ont été blessés, a-t-il ajouté.