Entre la guerre dans l'Est et une crise économique sans précédent, l'Ukraine a connu en 2014 sa pire année «depuis la Seconde Guerre mondiale», a estimé mardi la présidente de la Banque centrale en affichant un optimisme prudent pour 2015.

Avec une chute du produit intérieur brut de 7,5% et une dépréciation de 50% de la monnaie nationale, «notre pays n'avait pas connu d'année aussi difficile depuis au moins la Deuxième Guerre mondiale», a déclaré Valeria Gontareva au cours d'une conférence de presse pour faire le bilan de l'année.

«Les défis économiques sont liés à l'agression militaire russe» contre l'Ukraine qui a perdu en 2014 «20% de son économie», a pour sa part estimé le premier ministre Arseni Iatseniouk.

Ayant perdu la péninsule de Crimée annexée en mars à la Russie, l'Ukraine combat depuis plus de huit mois une rébellion séparatiste armée prorusse dans le bassin minier et industriel du Donbass dans l'est où ont péri plus de 4700 personnes.

Réduire le commerce avec Moscou

Mme Gontareva a précisé que le taux d'inflation atteignait fin novembre en Ukraine 21% en raison d'une détérioration rapide du niveau de réserves de la banque centrale en or et en devises.

Interrogée sur la chute du rouble, qui a perdu un tiers de sa valeur depuis le début de l'année, Mme Gontareva a répondu qu'«elle s'en réjouissait en tant que citoyenne» ukrainienne.

«Mais cela ne peut pas me réjouir en tant que présidente de la Banque centrale, car la Russie reste l'un de nos partenaires commerciaux les plus importants. La dévaluation du rouble a une influence négative sur la hryvnia», a-t-elle ajouté.

Fortement affecté par la chute des cours du pétrole et les sanctions économiques décrétées à l'encontre de la Russie en raison de la crise ukrainienne, le rouble a connu une année noire.

M. Iatseniouk a assuré que les échanges commerciaux entre l'Ukraine et la Russie «ont chuté de moitié» et que la Russie cesserait d'être l'un des principaux partenaires de l'Ukraine «très prochainement».

Très dépendante de la Russie en matière énergétique, l'Ukraine a toutefois signé mardi avec Moscou un accord de livraison d'électricité ce qui doit notamment permettre d'approvisionner la Crimée soumise ces derniers jours à d'importantes coupures de courant.

M. Iatseniouk a en revanche annoncé la signature imminente d'un accord avec le géant américain Westinghouse sur des livraisons supplémentaires de combustible nucléaire aux réacteurs nucléaires qui sont aujourd'hui presque tous approvisionnés par le monopole russe TVEL.

Budget d'austérité

«Je pense que ce que nous avons vécu cette année ne se reproduira jamais. Sans l'ombre d'un doute, nous abordons 2015 avec optimisme», a assuré Mme Gontareva.

Elle a toutefois indiqué que la prévision d'inflation pour 2015 avait été revue à la hausse à 17-18% contre 12-15% auparavant «compte tenu d'une hausse prévue des tarifs du gaz et de l'électricité», l'une des mesures de réduction du déficit exigées par le Fonds monétaire international (FMI).

La veille les députés ukrainiens avaient approuvé un budget d'austérité qui doit permettre au pays d'obtenir l'aide financière cruciale du FMI, dont une mission revient à Kiev le 8 janvier, ainsi que d'autres bailleurs internationaux.

Les dépenses prévues pour la défense et la sécurité devaient toutefois pratiquement quintupler à presque 5% du PIB, contre environ 1% en 2014, pour atteindre, selon le gouvernement, 90 milliards de hryvnias (5,4 milliards de dollars). En retour, plusieurs aides sociales vont être supprimées.

Mme Gontareva a dit espérer que le Fonds verserait par la suite à l'Ukraine trois tranches dont elle n'a pas précisé le montant.

M. Iatseniouk a pour sa part souligné que l'Ukraine devrait apporter des amendements au budget après des consultations avec le FMI, «en optimisant la politique sociale».

Sous la pression du FMI, la banque centrale ukrainienne a finalement abandonné tout soutien à la devise, qui s'échangeait mardi matin à 15,82 hryvnias pour un dollar contre 8,24 hryvnias en début d'année.