Un coup sourd et, une dizaine de secondes plus tard, un sifflement suivi d'une forte explosion : samedi, les duels d'artillerie se sont intensifiés entre forces ukrainiennes et séparatistes à Donetsk, principal fief des rebelles prorusses de l'est de l'Ukraine.

La matinée avait été inhabituellement calme dans les quartiers nord de la ville proches de l'aéroport, épicentre de combats meurtriers que se livrent les deux camps depuis plusieurs mois à Donetsk.

Depuis le début de l'après-midi, les tirs se poursuivent avec quelques rares interruptions dans la périphérie de cette cité qui comptait un million d'habitants avant le début des hostilités à la mi-avril.

«Il vaut mieux ne pas aller dans cette direction. Les obus tombent près de l'hôpital numéro 21 et du marché», avertit Zoïa Fiodorovna, une dame d'une cinquantaine d'années qui quitte le quartier après avoir vérifié l'état de sa maison et nourri son chien qui garde les lieux.

«Je ne dors plus ici. Je me suis installée chez une amie qui habite dans un quartier plus tranquille», explique-t-elle.

Soudain, un bruit sourd et prolongé, très différent des tirs d'artillerie. «Ce sont nos blindés qui changent de position pour échapper aux tirs ukrainiens», affirme un autre habitant venu, comme Zoïa Fiodorovna, voir si sa maison n'a pas été victime de pillards.

«Ça tire de plus en plus près»

Ceux qui le peuvent ont quitté ces quartiers particulièrement mal placés, entre l'aéroport et la gare ferroviaire, qui a été elle aussi la cible de bombardements en août.

Mais nombreux sont ceux qui n'ont pas d'autre choix que de rester sur place.

«Aller où? Je n'ai aucun endroit où aller, personne chez qui me réfugier. Et puis ici c'est ma maison», dit Vladimir Iegorovitch, 78 ans, en train de scier du bois devant chez lui, assis sur un petit tabouret.

Cet ancien mineur n'a pas reçu sa retraite depuis cinq mois. Sans électricité depuis deux mois et sans chauffage alors que la température descend au-dessous de zéro la nuit, il vit d'une maigre aide humanitaire distribuée toutes les deux semaines.

«Ce qui doit arriver arrivera de toute façon. Si je dois mourir sous les bombes, ça veut dire que ça devait se passer comme ça», dit-il avec philosophie.

Dans les rues, des meutes de chiens et de chats errants et quelques rares passants.

«Aujourd'hui, ça tire de plus en plus près, avec du gros calibre. Hier soir, j'ai sauté sous mon lit, tellement les bombardements semblaient proches de chez moi», raconte Lioudmila Leonidovna qui habite à quelques centaines de mètres de l'aéroport.

Entre deux tirs d'artillerie, on entend clairement une douce voix féminine annoncer au haut-parleur la prochaine entrée en gare du train Sébastopol-Donetsk.

Cette annonce traditionnelle a quelque chose d'un peu surréaliste dans un décor de maisons détruites et d'impacts d'obus un peu partout.

Aux abords de la gare, quelques chauffeurs de taxi commentent la découverte que vient de faire l'un d'entre eux devant le bâtiment : six éclats d'obus larges de deux ou trois centimètres et longs d'une dizaine de centimètres.

La nuit est tombée depuis longtemps, mais les tirs continuent. En début de soirée, des journalistes de l'AFP dans le centre de Donetsk entendaient de fortes détonations dans les environs.