Le renseignement allemand accuse les séparatistes prorusses en Ukraine d'avoir abattu en juillet le vol MH17, avec 298 personnes à son bord, à l'aide d'un missile sol-air volé à l'armée ukrainienne, rapporte dimanche l'hebdomaire Der Spiegel.

Les séparatistes auraient dérobé un système de missiles sol-air de moyenne portée Bouk dans une base militaire ukrainienne, avant de l'utiliser pour abattre l'avion de la Malaysia Airlines le 17 juillet, estime le patron des services secrets allemands, cité par le Spiegel.

Gerhard Schindler, président du renseignement extérieur allemand (BND), a livré ses conclusions sur l'écrasement du MH17 le 8 octobre, devant la commission du Bundestag qui contrôle les services secrets, sur la foi de «photos et enregistrements satellites», précise le magazine.

Cette thèse diffère de celle du gouvernement américain, qui accuse certes les séparatistes d'avoir utilisé un missile Bouk, de type SA-11, mais affirme que leur système de lancement «a été acheminé depuis la Russie», mettant directement en cause la responsabilité de Moscou.

«Ces accusations contre nous sont sans fondement», a riposté le «vice-premier ministre» de la république autoproclamée de Donetsk, Andreï Pourguine, cité dimanche après-midi par l'agence de presse russe Interfax.

Un système de missiles sol-air Bouk ne peut être opéré que par «des spécialistes de haut niveau, formés à ces fins», a-t-il assuré. Des responsables du renseignement américain avaient envisagé, en juillet, que l'avion ait pu être abattu «par erreur» par des séparatistes mal entraînés.

«Les anciens mineurs qui défendent aujourd'hui leur patrie avec des armes dans leurs mains n'ont pas de connaissances ni d'acquis pour opérer un système si sophistiqué», a fait valoir M. Pourguine.

Enquête en Allemagne 

Commentant l'enquête menée par des experts néerlandais, qui a abouti le 9 septembre à un premier rapport prudent, le patron du BND a accusé l'Ukraine comme la Russie d'avoir «falsifié» les pièces présentées aux enquêteurs, sans plus de précisions.

Kiev et Moscou s'accusent mutuellement d'être à l'origine de l'écrasement. Selon l'Ukraine, l'avion a été abattu par un missile Bouk «gracieusement offert aux rebelles» par le président russe Vladimir Poutine.

À l'inverse, la Russie affirme qu'un avion de chasse ukrainien se trouvait à proximité et que des missiles sol-air étaient positionnés dans la zone.

D'après le Spiegel, le parquet fédéral allemand situé à Karlsruhe a ouvert une enquête sur l'écrasement, au motif qu'il pourrait relever d'un «crime de guerre» justifiant la compétence universelle de la justice allemande, quels que soient la nationalité des suspects et l'endroit où se sont produits les faits.

Interrogé par le site internet du quotidien économique Handelsblatt, un responsable du Linkspartei (gauche radicale) a estimé que le BND devait «rendre publiques ses informations et ses conclusions» afin qu'elles fassent l'objet de vérifications.

«Les investigations sur un tel crime ne doivent pas être menées par les services secrets, qui poursuivent leurs propres buts, mais par une enquête internationale indépendante», a poursuivi Tobias Pflüger, vice-président du parti.

Au total, 272 victimes, dont les restes ont été emmenés aux Pays-Bas, ont déjà été identifiées par les experts en médecine légale. Les deux tiers des passagers étaient néerlandais.