L'Ukraine a affirmé jeudi que des «troupes russes» avaient pris le contrôle de la ville frontalière stratégique de Novoazovsk, à 100 km au sud du bastion rebelle de Donetsk, où de violents affrontements ont eu lieu ces derniers jours.

«Hier, les soldats russes ont pris le contrôle de la ville de Novoazovsk», cité côtière de 11 000 habitants à quelques kilomètres de la frontière russe, a indiqué le Conseil national de sécurité et de défense ukrainien sur Twitter, ajoutant que plusieurs autres villages à proximité avaient également été capturés.



Réunion d'urgence du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité de l'ONU va tenir une réunion d'urgence sur la crise en Ukraine jeudi à 16 h GMT (midi, heure de Montréal).

Cette réunion d'urgence a été demandée par la Lituanie alors que Kiev a demandé aux Occidentaux une aide militaire «d'envergure» face à l'entrée de troupes russes dans l'Est séparatiste, faisant craindre une guerre ouverte entre la Russie et l'Ukraine.

Plus de 1000 soldats russes

Plus de mille soldats russes combattent actuellement sur le territoire ukrainien et notamment dans la zone de Novoazovsk, a indiqué jeudi un haut responsable militaire de l'OTAN, jugeant leur présence «très inquiétante».

«Bien plus d'un millier de soldats russes combattent actuellement en Ukraine. Ils soutiennent les séparatistes, se battent avec eux» contre les forces armées ukrainiennes, a-t-il affirmé, disant se baser sur «une estimation très prudente».

Kiev a affirmé jeudi que des «troupes russes» avaient pris le contrôle de la ville frontalière de Novoazovsk, et dénoncé une «invasion directe» du pays.

«Depuis lundi, nous avons assisté à de nouvelles incursions près de Novoazovsk», ce qui crée un «nouveau front pour les forces ukrainiennes», ce qui les met «dans une situation terrible», a indiqué le responsable de l'OTAN.

Il a indiqué que «depuis mi-août, des forces russes étaient activement engagées dans les combats». Il a aussi estimé à environ 20 000 le nombre de soldats déployés le long de la frontière russo-ukrainienne.

Le responsable a estimé que cette «escalade significative des opérations militaires russes» était «directement liée aux succès des opérations militaires ukrainiennes» contre les séparatistes.

Porochenko annule sa visite en Turquie 

Le président ukrainien Petro Porochenko a déclaré jeudi dans un message télévisé avoir annulé sa visite en Turquie en raison de l'«intrusion de troupes russes» en Ukraine, où la situation se «détériore rapidement».

«J'ai pris la décision d'annuler ma visite de travail en Turquie face à la détérioration rapide de la situation dans la région de Donetsk, en particulier à Amvrossiïvka et Starobechevé à cause de l'intrusion des troupes russes», a-t-il expliqué.

Il a dit avoir convoqué une réunion d'urgence du Conseil national de sécurité et de défense pour élaborer un plan d'action.

«Le président doit rester aujourd'hui en Ukraine», a-t-il souligné.

M. Porochenko devait assister jeudi en Turquie à l'investiture du président Recep Tayyip Erdogan en marge de laquelle il devait tenir sept rencontres bilatérales.

Kiev demande à l'UE «une aide militaire d'envergure

L'Ukraine a demandé jeudi à l'Union européenne de lui accorder une «aide militaire d'envergure» suite à une «invasion russe non dissimulée», selon l'ambassadeur ukrainien auprès de l'Union européenne Konstiantyn Elisseïev.

«Nous appelons à une session extraordinaire du Conseil européen le 30 août sur l'Ukraine (...). Assez de connivence et d'apaisement de l'agresseur. La solidarité doit se matérialiser par des sanctions significatives et une aide militaire et technique d'envergure», a déclaré M. Elisseïev selon la page Facebook de l'ambassade ukrainienne auprès de l'UE.

L'UE «extrêmement préoccupée»

L'Union européenne s'est dite jeudi «extrêmement préoccupée» par les informations sur une incursion des forces russes en Ukraine.

«Nous sommes extrêmement préoccupés par les derniers développements, notamment les informations sur le terrain», a déclaré au cours d'un point de presse Maja Kocijancic, porte-parole du service diplomatique de l'UE.

Selon les propos tenus par l'ambassadeur américain à Kiev, Geoffrey Pyatt, sur son compte Twitter, «un nombre croissant de soldats russes intervient directement dans les combats en territoire ukrainien». Toujours selon le diplomate américain, Moscou aurait envoyé en Ukraine son système anti-aérien le plus récent.

Moscou dément

L'Ukraine a dénoncé jeudi auprès de l'OSCE «une invasion directe» russe de son territoire, lors d'une réunion tendue après laquelle Moscou a affirmé au contraire qu'il n'y avait «pas de soldats russes» chez son voisin.

«La situation s'est aggravée de façon significative, nous avons enregistré une invasion directe des forces militaires russes dans les régions de l'est de l'Ukraine», a déclaré à la presse l'ambassadeur de Kiev Ihor Prokopchuk après une réunion spéciale de l'organisation basée à Vienne.

«Le scénario a été testé en Crimée», la région rattachée en mars à la Russie, a-t-il insisté. «Ce dont nous sommes témoins aujourd'hui est l'invasion, et l'entrée directe de forces russes dans la partie orientale de l'Ukraine, ce qui veut dire une confrontation directe».

Il n'y a «pas de soldats russes» en Ukraine, a assuré au contraire l'ambassadeur de la Russie à l'OSCE Andreï Kelin après la réunion.

M. Kelin s'est borné à mentionner l'unité d'une «dizaine» de soldats dont Kiev avait annoncé l'arrestation mardi, et dont Moscou assure qu'ils se trouvaient en Ukraine de façon non intentionnelle.

L'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), une institution née de la guerre froide et fonctionnant sur la règle du consensus, joue depuis le début de la crise un rôle d'espace de dialogue entre la Russie, l'Ukraine et les puissances occidentales.

La réunion de jeudi s'y est déroulée dans un climat très tendu, le représentant américain Daniel Baer appelant ses homologues à «ne pas tomber dans le jeu de voyous» qu'il accuse la Russie de pratiquer.

M. Kelin lui a répliqué en se disant «injurié».

Moscou a toujours démenti les allégations d'intrusion en Ukraine, dont l'OTAN et la Pologne affirment avoir la preuve.

Jeudi matin, le président français François Hollande avertissait solennellement qu'une telle présence militaire russe en Ukraine serait «intolérable et inacceptable».

Kiev a réclamé de son côté une «aide militaire d'envergure» à l'Union européenne afin de faire face à une «invasion russe non dissimulée».