L'Ukraine a effectué un premier paiement à la Russie pour régler sa dette gazière, selon plusieurs responsables vendredi, ouvrant la voie à de nouvelles discussions entre les deux capitales pour éviter des coupures de gaz dès la semaine prochaine.

«Nous n'avons pas encore la solution mais nous avons fait des progrès», a déclaré à Berlin le commissaire européen à l'Énergie Günther Oettinger, à l'issue de négociations avec le ministre russe de l'Énergie Alexandre Novak, son homologue ukrainien Iouri Prodan et les patrons du fournisseur russe Gazprom et du distributeur ukrainien Naftogaz dans la capitale allemande.

Ces négociations, qui faisaient suite à plusieurs autres ces dernières semaines, étaient cruciales car Gazprom a menacé de couper le robinet à Kiev dès mardi, mettant en péril aussi l'approvisionnement de l'Union européenne et envenimant une situation déjà explosive entre les deux pays.

L'Ukraine refusait de régler sa dette --3,5 milliards de dollars d'impayés-- si le fournisseur russe Gazprom ne s'engageait pas sur des rabais pour les livraisons futures. Gazprom pour sa part refuse de parler prix tant que Kiev n'a pas épongé ses arriérés. Le groupe exige en outre le paiement en avance des livraisons de juin, soit 1,66 milliard de dollars.

Mais Kiev semble avoir fait un pas pour désamorcer le conflit. M. Prodan a confirmé que son pays avait versé 786 millions de dollars à Gazprom ce vendredi.

Un virement via New York

Ce paiement correspond à la facture gazière de Kiev pour les mois de février et mars, a précisé M. Oettinger. L'argent a été viré sur le compte d'une banque américaine, et doit être transféré depuis New York sur le compte de Gazprom.

«Dès que l'argent sera sur le compte de Gazprom (...), d'autres négociations seront possibles», a dit M. Oettinger. Les fonds devraient arriver à leur destinataire lundi matin et, sous réserve que Gazprom en accuse réception, de nouvelles négociations sont prévues lundi après-midi à Bruxelles.

Environ un quart du gaz à destination des pays européens transite par l'Ukraine et l'UE s'efforce de jouer les médiateurs pour éviter le pire.

«Nous sommes sûrs que les fonds que nous avons payés vont arriver lundi», a affirmé M. Prodan.

«Nous pourrons voir seulement lundi si cela a vraiment été fait», a déclaré pour sa part le ministre russe. Mais il a indiqué avoir eu «confirmation» vendredi à 10h15 que l'argent était parti.

Le prix toujours pomme de discorde

Les négociations de lundi viseront à trouver «une solution globale», qui réglera les différends sur les impayés -pour les mois postérieurs à mars Kiev conteste le prix réclamé par Moscou- et fixera un prix «conforme au prix du marché» pour les livraisons futures, selon M. Oettinger.

Après la destitution du président ukrainien prorusse Viktor Ianoukovitch en février, Gazprom avait augmenté le prix du gaz facturé à l'Ukraine, lui faisant payer bien plus qu'aux autres Européens.

À Kiev, le premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk a affirmé que son pays n'accepterait «jamais le prix du gaz d'environ 500 dollars pour 1000 mètres cube», laissant présager des discussions ardues sur ce point lundi.

«Nous sommes disposés à être constructifs et nous espérons que notre partenaire l'est aussi», a pour sa part déclaré M. Novak, suggérant que Gazprom était prêt à revoir ses prix, et adoptant un ton nettement plus conciliant que lors de son intervention devant la presse après de précédentes négociations lundi.

L'Ukraine est exsangue financièrement et sous perfusion financière du Fonds monétaire international (FMI). Mais «nous avons commencé des discussions sur l'aide financière que l'UE peut apporter à l'Ukraine», a dit le ministre russe.

Si en début de semaine l'élection d'un nouveau président, Petro Porochenko, avec lequel Moscou s'est dit prêt à dialoguer a fait naître quelques espoirs d'apaisement, la situation dans l'Est de l'Ukraine est toujours extrêmement tendue, et les morts se comptent par dizaines des deux côtés depuis le début de la semaine.