Le président russe Vladimir Poutine s'est dit prêt à couper les livraisons de gaz à l'Europe via l'Ukraine si Kiev ne paie pas sa facture, a déclaré le premier ministre slovaque Robert Fico après une rencontre jeudi à Bratislava avec le secrétaire général de l'OTAN Anders Fogh Rasmussen.

«J'ai informé M. Rasmussen de la plus récente menace : l'arrêt des livraisons de gaz via l'Ukraine. Aujourd'hui, plusieurs pays membres de l'UE, dont la Slovaquie, ont été informés par le président Poutine qu'il n'y aura pas de livraisons à l'Europe si l'Ukraine ne paie pas sa facture d'ici au 1er juin», a déclaré M. Fico à la presse.

Le président Poutine a déclaré pour sa part jeudi que la Russie n'avait reçu aucune «proposition concrète» de l'UE concernant les paiements de l'Ukraine pour les livraisons de gaz russe, appelant l'UE à une implication «plus active».

Moscou avait menacé de couper les approvisionnements vers l'Ukraine dès le 3 juin si celle-ci ne réglait pas à l'avance sa facture pour juin, soit 1,66 milliard de dollars, au risque de perturber les livraisons vers l'Union européenne comme lors des «guerres du gaz» de 2006 et 2009.

Réunis jeudi à Bratislava, les chefs de gouvernement de quatre pays de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie) ont appelé à mettre en place un mécanisme de solidarité face à la coupure des livraisons.

«Nous nous sommes mis d'accord sur la nécessité d'un mécanisme de crise au cas où la Russie arrêterait l'approvisionnement en gaz via l'Ukraine, et il y a sur ce point une forte solidarité entre les quatre pays de Visegrad», a déclaré M. Fico à la presse.

«Nous avons besoin d'une coopération aussi étroite que possible au niveau d'experts et de ministres, pour mettre au point le plus vite possible les détails d'un mécanisme de solidarité gazière en cas de crise», a renchéri son homologue polonais Donald Tusk.

Selon lui, l'une des premières tâches devrait être la préparation d'un cadre commun d'achats et de paiements pour le gaz.

«Notre exemple de solidarité régionale pourrait inciter l'Union européenne toute entière à adopter un tel mécanisme au niveau de l'UE», a-t-il ajouté.

L'UE importe le quart de son gaz de Russie, dont près de la moitié transite par l'Ukraine.

Américains et Européens menacent la Russie de nouvelles sanctions

Américains et Européens ont menacé jeudi à Londres de prendre de nouvelles sanctions contre la Russie si elle tentait d'entraver la tenue en Ukraine du scrutin présidentiel du 25 mai, crucial pour l'avenir du pays.

«Si la Russie ou ceux qui agissent pour son compte perturbent les élections, les États-Unis et les pays de l'Union europénne ici présents imposeront des sanctions économiques ciblées sur certains secteurs», a déclaré le secrétaire d'État John Kerry à l'issue d'une rencontre avec ses homologues français, allemand, britannique et italien.

«Notre message est vraiment simple: «Laissez l'Ukraine voter. Laissez le peuple ukrainien choisir son avenir», a-t-il dit.

Le but des premières séries de sanctions économiques prises par Washington et Bruxelles contre Moscou visait «à faire usage du scalpel plutôt que du marteau», selon un responsable américain sous couvert d'anonymat. Mais «nous pouvons faire beaucoup de choses pour créer ce saignement», a-t-il ajouté.

La menace de sanctions intervient alors que dans l'est de l'Ukraine, les affrontements entre l'armée ukrainienne et les séparatistes armés se multiplient près d'un mois après le lancement d'une opération «antiterroriste» visant à rétablir le contrôle de Kiev sur les régions sécessionnistes.

Les partisans ukrainiens de Moscou continuent, par ailleurs, d'étendre leur contrôle, comme à Antratsyt, dans la région de Lougansk, où une mairie de quartier est tombée jeudi aux mains de dizaines d'insurgés armés.

«Les séparatistes prorusses et les partisans sont littéralement en train de semer le chaos au sein de communautés telle que Slaviansk,» a souligné John Kerry.

La présidentielle du 25 mai en Ukraine, convoquée après la destitution en février de Viktor Ianoukovitch, est jugée «cruciale» par les Occidentaux pour sortir de la crise.

«Nous essayons de faire avancer les choses. Nous espérons que les élections seront justes. Et nous demandons aux Russes de ne pas se mêler de cela», a déclaré à Londres le chef de la diplomatie française Laurent Fabius.

La Russie a longtemps rejeté le principe de l'élection avant que le président Vladimir Poutine finisse par estimer que le scrutin pourrait effectivement aller «dans le bon sens».

Depuis le début de la crise ukrainienne, entraînant  la pire crise diplomatique entre l'Occident et la Russie depuis la chute de l'URSS en 1991, Washington et Bruxelles ont pris des sanctions diplomatiques et économiques sans précédent contre des sociétés et  dizaines de personnalités russes.

Pour tenter de relancer les pourparlers avec Moscou d'ici le scrutin, Kiev a l'intention d'organiser lundi, dans l'est du pays, une nouvelle table ronde sur le dialogue d'unité nationale, après une première tentative mercredi, selon un membre du Département d'État américain.

«Toutes les figures politiques ou toutes les ONG qui souhaitent y participer le peuvent. La seule exigence est qu'ils renoncent à la violence», a-t-il ajouté.