Des responsables de la police norvégienne ont exclu mercredi l'existence de complices autour du tueur de masse Anders Behring Breivik, qui affirme pour sa part appartenir à un réseau prêt à frapper de nouveau d'ici quinze mois.

L'existence ou non des mystiques Chevaliers Templiers est importante en ce qu'elle peut jeter un peu de lumière sur la question centrale du procès : la santé mentale de Breivik qui a tué 77 personnes le 22 juillet 2011.

L'extrémiste de droite fait-il partie, comme il le dit, d'un réseau qui a juré de protéger l'Europe contre l'islam et le multiculturalisme? Ou a-t-il fantasmé cette organisation dont la police n'a retrouvé aucune trace?

« Nous nous sentons sûrs de cette conclusion : rien dans les pièces du dossier ne suggère une quelconque complicité physique ou psychologique », a témoigné Kenneth Wilberg, de la police d'Oslo, au 27e jour du procès.

Aux enquêteurs et dans le manifeste idéologique de 1500 pages diffusé sur l'internet juste avant les attaques, Breivik a affirmé qu'il était membre des Chevaliers Templiers, une organisation pan-européenne qui aurait vu le jour à Londres en 2002.

Reconnaissant que la présentation était « pompeuse », l'extrémiste de 33 ans a depuis précisé que l'organisation comptait en fait six membres et assuré que d'autres « cellules » pourraient frapper à tout moment.

« La police n'a pas trouvé de preuves que les Chevaliers Templiers existent sous la forme évoquée par l'accusé », a ajouté M. Wilberg, en présentant les résultats de la plus grande enquête jamais conduite en Norvège, laquelle a mobilisé jusqu'à 1000 policiers.

Le fonctionnaire a toutefois concédé que la police n'avait pu déterminer l'identité que d'une infime partie des milliers de personnes à qui Breivik avait voulu envoyer son manifeste le 22 juillet et parmi lesquelles figure, selon l'accusé, un autre Chevalier Templier.

Un tel travail reviendrait à « chercher une aiguille parmi 8000 aiguilles », a expliqué le policier.

Sur les 8000 destinataires prévus initialement, le manifeste a été envoyé à seulement un millier de personnes en raison d'un filtre du fournisseur d'accès limitant le nombre de récipiendaires et la police a concentré son enquête sur ce seul groupe.

Breivik lui-même a ironisé sur la décision des enquêteurs d'ignorer les 7000 autres destinataires prévus.

« En ce qui me concerne, c'est très bien parce que ça m'évite d'avoir à redouter que d'autres soient arrêtés », a-t-il réagi devant la Cour.

« Tout ce qui est dans le manifeste est vrai et cela sera prouvé d'ici un an et trois mois quand une autre attaque aura eu lieu », a-t-il ajouté.

Pour expliquer les conclusions des enquêteurs, Vidar Saether, de la police criminelle, a énoncé les incohérences entourant l'histoire des Chevaliers Templiers.

Breivik dit que l'organisation est née en grande partie en réaction aux bombardements de l'OTAN sur la Serbie en 1999. Mais il est alors actif au sein du mouvement jeunes de la droite populiste qui soutient l'Alliance atlantique, a souligné le policier.

Il dit avoir été coopté par le groupe à l'issue d'un strict processus de sélection. Mais son appartenance à la droite populiste et son casier judiciaire -pour des tags et conduite en état d'ivresse- ne plaident pas en sa faveur.

Il affirme s'être rendu au Liberia en 2002 pour rencontrer un « héros de guerre » serbe sous couvert d'un négoce de diamants. Mais vu les sommes dépensées, l'achat de diamants était bien l'objet du voyage.

Il assure avoir participé à deux sessions de formation pour militants nationalistes dans les pays baltes. Mais ses deux très brefs voyages en Lituanie et Estonie en 2004 répondaient à des impératifs financiers de blanchiment d'argent.

« En théorie, c'est impossible de prouver que quelque chose n'existe pas », a admis à la barre un autre responsable de la police criminelle, Alf Nissen. « Tout ce qu'on peut faire, c'est chercher, chercher et chercher et, à un moment donné, on doit conclure que ça n'existe pas », a-t-il ajouté.

Parallèlement au procès, une cinquantaine de policiers sont encore impliqués dans l'enquête sur les attaques du 22 juillet 2011.

Ce jour-là, Breivik avait tué 77 personnes en ouvrant le feu sur des jeunes travaillistes réunis en camp d'été sur l'île d'Utoya juste après avoir fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo.