Anders Behring Breivik, qui tient à être reconnu pénalement responsable pour la mort de 77 personnes l'an dernier en Norvège, a accusé mercredi les experts-psychiatres d'avoir inventé des propos visant à le faire passer pour dément.

«Ce sont des inventions mal intentionnées», a déclaré Breivik en évoquant des passages de l'expertise psychiatrique qui avait conclu l'an dernier qu'il était psychotique. «Ce n'est peut-être pas mal intentionné, mais c'est en tout cas faux», a-t-il ensuite ajouté.

Mandatés par le tribunal d'Oslo pour examiner sa santé mentale, les psychiatres Synne Soerheim et Torgeir Husby avaient conclu en novembre dernier que Breivik souffrait de «schizophrénie paranoïde», un diagnostic plaidant pour un internement psychiatrique plutôt que la prison.

«80% du contenu des entretiens (sur lesquels les psychiatres se sont appuyés pour tirer leurs conclusions, NDLR) est inventé», a estimé l'extrémiste de droite de 33 ans devant le tribunal d'Oslo.

Les deux experts se sont fait un avis «très tôt» et ont conduit leurs travaux en vue d'étayer leur opinion, selon l'accusé.

«Ils étaient émotionnellement sous le coup (des attaques du 22 juillet 2011, NDLR) et il leur manquait des compétences pour évaluer un auteur de violences politiques», a-t-il affirmé.

«Si j'avais lu la description de la personne décrite (dans leur rapport, NDLR), j'aurais été d'accord: cette personne relève d'un hôpital psychiatrique», a-t-il dit. Mais «la personne décrite dans ce rapport, ce n'est pas moi», a-t-il ajouté.

Ayant déclaré dans le passé qu'un internement psychiatrique serait «pire que la mort», Breivik veut être déclaré sain d'esprit et donc pénalement responsable pour ne pas voir son idéologie islamophobe être décrédibilisée par un diagnostic.

Mercredi, il a répété ne pas vouloir «finir dans un asile» et évoqué la lettre d'un militant nationaliste suédois qui a décrit son propre traitement dans un hôpital psychiatrique comme «une lobotomie chimique».

«Il décrit ça comme atroce. Il bave assis à une table», a-t-il relaté.

Une contre-expertise commandée par la justice après le tollé provoqué par la première évaluation avait quant à elle conclu que Breivik est sain d'esprit, semant le trouble sur sa santé mentale réelle.

La question, au coeur du procès, devra in fine être tranchée par les juges dans leur verdict attendu en juillet.

«Si j'avais été un djihadiste barbu, je n'aurais pas fait l'objet d'une expertise psychiatrique du tout», avait déjà affirmé Breivik devant la Cour lundi.

«Mais parce que je suis un militant nationaliste, je suis exposé à un grave racisme», a-t-il ajouté. «Ils essaient de "délégitimer" tout ce en quoi je crois».

Le 22 juillet, Breivik avait tué 69 personnes en ouvrant le feu sur des centaines de jeunes travaillistes réunis pour un camp d'été sur l'île d'Utoya, juste après avoir fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo, faisant huit autres victimes.

Le tueur a qualifié son geste d'«attaques préventives contre les traîtres à la patrie», expliquant s'en être pris à des «élites» coupables, selon lui, de livrer la société norvégienne au multiculturalisme et à «l'invasion musulmane».

S'il reconnaît les faits, il refuse de se déclarer coupable au sens pénal du terme.