Deux adolescents de 14 ans, un Franco-Norvégien de 25 ans... Deux semaines après les pires attaques commises sur son sol depuis la Seconde Guerre mondiale, la Norvège enterrait vendredi 32 des 77 victimes de l'extrémiste Anders Behring Breivik.

La liste des victimes témoigne de l'horreur des attaques du 22 juillet, un attentat à la bombe contre le siège du gouvernement d'abord, puis une fusillade contre un camp d'été de jeunes travaillistes sur l'île d'Utoya: près de la moitié des personnes inhumées vendredi n'avaient pas encore 18 ans.

Parmi les jeunes gens qui devaient être mis en terre figure le Franco-Norvégien Christopher Perreau, tué à 25 ans sur Utoya et dépeint comme un talent très prometteur de la section jeune du parti travailliste.

Né de père français et de mère norvégienne, il devait être inhumé à Hommelvik, sa ville d'origine près de Trondheim (ouest), en présence du ministre norvégien du Commerce et de l'Industrie Trond Giske et de l'ambassadrice de France à Oslo, Brigitte Collet.

«C'était très pénible parce que c'est le petit (frère de Christopher, âgé de 15 ans) qui nous a téléphoné par mobile et qui nous a raconté que quelqu'un tirait sur les gens», a témoigné son père, Claude Perreau, la semaine dernière sur la radio France Inter.

«Il n'y a pas de place pour la colère quand il y a trop de souffrance», avait-il ajouté.

Comme elle s'y est engagée, la Norvège officielle devait être représentée à toutes les obsèques où sa présence était souhaitée par la famille.

Le premier ministre Jens Stoltenberg devait lui-même assister à l'enterrement de Monica Elisabeth Boesei, une femme de 45 ans, généralement décrite comme «mère Utoya», car c'est elle qui y organisait le camp d'été des jeunes travaillistes depuis 20 ans.

Ailleurs dans le pays, familles, officiels et anonymes s'apprêtaient à faire leurs adieux aux autres victimes, dont Sharidyn Svebakk-Bohn, surnommée Sissi, fauchée quelques jours seulement après son 14e anniversaire, et Johannes Buoe, un petit bonhomme du même âge.

«Je ne peux cesser de revoir leurs jeunes visages», a témoigné en pleurs l'ex-chef du gouvernement norvégien, Gro Harlem Brundtland, jeudi lors de l'enterrement de Marianne Sandvik, 16 ans, abattue alors qu'elle essayait de fuir Utoya à la nage.

Figure historique du travaillisme, Mme Harlem Brundtland s'était elle-même adressée aux jeunes réunis sur l'île le 22 juillet, quelques heures seulement avant la fusillade.

Se présentant comme un croisé en guerre contre «l'invasion musulmane» et le multiculturalisme en Europe, Anders Behring Breivik, 32 ans, reste en détention provisoire dans une prison de haute sécurité.

La police norvégienne l'a entendu jeudi, pour la troisième fois depuis son arrestation. Lors de cette audience, il s'est expliqué sur ses voyages à l'étranger où, selon son avocat, il dit s'être procuré l'essentiel de l'équipement utilisé pour perpétrer le massacre.

Alors que l'avocat a fait état de personnes qui l'auraient aidé à obtenir ce matériel, les enquêteurs estiment que Behring Breivik a «selon toute vraisemblance» agi seul, comme il l'affirme lui-même.

Sortant de son anonymat pour la première fois dans un journal vendredi, son mentor norvégien, le blogueur Fjordman (l'homme des fjords), s'est distancié du tueur, expliquant qu'après avoir reçu quelques courriels de sa part en 2009 et 2010, il avait décliné son souhait d'une rencontre.

«Je ne sais pas pourquoi il demandait cela, mais j'ai refusé. Pas parce qu'il parlait de violences, mais parce que j'avais l'impression qu'il était ennuyeux comme un vendeur d'aspirateurs», a déclaré le blogueur, Peder Jensen de son vrai nom, au tabloïde Verdens Gang (VG).