Deux jours après la double attaque qui a fait plus de 93 morts, la communauté musulmane d'Oslo se disait dimanche soulagée qu'il ne s'agisse pas d'un attentat islamiste même s'ils étaient nombreux à s'agacer d'être «montrés du doigt dès qu'il y a une bombe».

Vendredi dans les heures suivant la double attaque, «toutes les pistes étaient envisagées», y compris celle de l'attentat islamiste.

Dans un rapport rendu public en début d'année, la sécurité intérieure norvégienne redoutait d'ailleurs principalement une attaque islamiste sur son sol, mais ne considérait pas l'extrême droite comme une «menace sérieuse».

C'est pourtant un Norvégien de 32 ans, qui s'appelle Anders Behring Breivik, «fondamentaliste chrétien» et proche de l'extrême droite, qui est arrêté en tant que suspect.

Dans les rues d'Oslo, la communauté musulmane a vécu les premières heures avec la crainte d'être «montrée du doigt».

«Vendredi, après l'explosion, je n'ai pas travaillé, je suis resté à la maison», explique Muhammad Ali Farah, 30 ans né à Mogadiscio. «J'avais peur, comme tous les taxis. Vous savez, ici, 99,7% des chauffeurs sont des immigrés. Tout le monde pensait que c'était des islamistes», ajoute-t-il.

«Mon chef est pakistanais, il a compris, il connaît le problème. Je n'ai repris le travail que samedi», raconte le chauffeur.

«Je me sens norvégien, je suis né ici, mais je suis d'origine marocaine. Pourtant, c'est vrai que tout le monde a tout de suite pensé à une attaque islamiste, on nous montre du doigt», selon Namir Atif, 30 ans.

«Il n'y a qu'à voir la tête du ministre de la Justice lorsqu'un journaliste a demandé si le suspect est islamiste et qu'il a répondu «Non, c'est un Norvégien d'origine», il avait presque de la peine que ce ne soit pas un étranger», s'agace le jeune homme.

Naïma, qui ne souhaite pas donner son nom, originaire également du Maroc, est arrivée à Oslo il y a trois mois. Elle s'y sent «tranquille», mais s'est «tout de suite inquiétée après l'attentat».

D'abord parce qu'elle habite non loin de l'endroit où une bombe a frappé le quartier des ministères, faisant sept morts. Ensuite parce qu'elle a tout de suite pensé que la communauté musulmane qui vit juste à côté des lieux allait être soupçonnée.

«Ils ont arrêté un Marocain quelques heures après, comme ça, sans raison», assure un jeune Tunisien qui refuse de donner son nom «parce qu'(il) n'a pas de papiers».

Attablé à la terrasse d'un café avec d'autres amis dans la même situation, il s'énerve que la communauté musulmane «soit tout le temps désignée coupable dès qu'il y a une bombe qui explose».

«La Norvège est mon pays, les musulmans eux aussi sont tristes de cette tragédie. Je me sens mal quand on peut penser qu'un musulman est capable de faire ça», dit son camarade d'origine palestinienne.