Le massacre sanglant dans une salle de cinéma d'Aurora a jeté une ombre sur ce petit coin du Colorado, mais l'or olympique décroché par la jeune nageuse Missy Franklin, originaire de cette ville, a été comme une éclaircie dans un ciel sombre.                                

La lycéenne de 17 ans au large sourire était déjà une petite vedette locale avant son départ pour les Jeux olympiques de Londres, mais elle a ensuite réussi à embraser le monde de la natation et remonter le moral des habitants de sa ville d'origine.

Missy Franklin étudie dans une école secondaire d'Aurora, la ville où le 20 juillet, un tireur fou a ouvert le feu à minuit pendant la projection du nouvel épisode de Batman, tuant 12 spectateurs. Elle vit à Centennial, non loin de là, où le meurtrier sera jugé.

Elle a appris la nouvelle du massacre alors qu'elle était à Londres, se préparant pour le plus grand événement de sa jeune vie.

« Pendant chacune de mes courses, je penserai à ce qui s'est passé dans le Colorado. C'est terrible et je suis tellement ébranlée. Ils (les habitants d'Aurora, NDLR) ne quittent pas mes pensées », avait-elle alors déclaré.

Ébranlée peut-être, mais pas vaincue.

Missy a gagné une médaille de bronze dans le relais 4X200 m nage libre et remporté l'or sur le 100 m dos seulement quinze minutes après avoir couru pour se qualifier pour la finale du 200 m nage libre.

Et d'autres courses sont encore à venir.

« Avec tout ce qui s'est passé ici ces derniers temps, les incendies de forêt et ensuite la fusillade d'Aurora, c'est vraiment particulier (...) Les gens ont besoin de quelqu'un qui les rassemble », explique Tom Suko, 27 ans, caissier dans un magasin de sport proche du domicile de Missy Franklin dans la banlieue de Denver.

Depuis le début de l'été, des milliers d'habitants du Colorado ont été déplacés à cause de violents incendies de forêt qui ont détruit des hectares de terrain et des maisons. La fusillade qui a suivi, qui également fait 58 blessés, a achevé d'assommer les habitants.

Les soutiens ont certes afflué, mais le parcours olympique de la vedette locale des bassins a mis du baume au coeur.

« Avec Missy, il n'y a pas de faux-semblant », lance John Koslosky, directeur des sports au collège jésuite Regis d'Aurora, où Missy Franklin viendra se réinscrire au lendemain de son retour de Grande-Bretagne.

« Notre école est à Aurora, elle a beaucoup d'amis ici et elle a grandi dans le coin », explique M. Koslosky. Ce n'est pas artificiel, personne n'a besoin de lui dire : « Ce serait bien que tu fasses ça », ça vient du coeur ».

« Je suis si fier d'elle », rayonne Kari Kline, un agent immobilier. « Simplement pour avoir oublié la compétition un instant et dit quelques mots sur ce qui venait de se passer, pour avoir pris le temps de faire ça ».

Mike Freitag, entraîneur de l'équipe junior de football du Colorado, est fier de voir un sportif représenter la région au niveau mondial. « Elle est restée ici, dans le Colorado. Elle n'est pas allée en Californie ou ailleurs pour s'entraîner ».

Missy Franklin a ainsi refusé un contrat pour continuer à nager dans l'équipe de l'école. Elle espère intégrer ensuite une équipe à l'université.

Katie Vanberthuysen, 13 ans, dont le frère était un condisciple de Missy, est particulièrement impressionnée par le rythme d'entraînement épuisant que s'impose la nageuse : debout à 4 h 30, deux heures de bassin avant d'aller à l'école et cinq heures d'entraînement après les cours.

« Cela m'a donné envie d'aller aux JO quand je serai plus grande », explique la jeune ado, joueuse de volley-ball. « Je crois qu'elle est le nouveau Michael Phelps. »