La publication hier des appels à l'aide au 911 durant la tuerie de Newtown a semé toute une controverse aux États-Unis. Les médias devaient-ils oui ou non les diffuser?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que les avis étaient partagés, alors que la ville du Connecticut les rendait publics sur son site web dans le sillage d'une demande d'accès à l'information de l'agence Associated Press (AP).

L'agence de presse a dû plaider devant la Freedom of Information Commission, les forces de l'ordre lui ayant refusé l'accès aux bandes audio dans les heures et les jours qui ont suivi la tragédie.

Les appels à l'aide enregistrés au 911 - auxquels l'employé des services d'urgence répond calmement - devaient être rendus publics à 14h hier, mais on pouvait déjà les entendre quelques minutes avant sur le site web d'un journal local.

Et pendant que le son des voix paniquées et des coups de feu circulaient un peu partout sur le web et dans les réseaux sociaux, les médias traditionnels, eux, se demandaient encore quelle conduite éthique adopter. Fallait-il respecter la volonté des parents? Leur publication était-elle d'intérêt public?

La diffusion d'appels au 911 lors de tragédies est chose courante, mais dans ce cas-ci, certains souhaitaient faire une exception parce que les victimes étaient des enfants. D'autres justifiaient l'écoute des bandes en invoquant le besoin de faire taire des rumeurs qui courent sur le web et qui prétendent, dit-on, que la tragédie n'a jamais eu lieu. Enfin, plusieurs médias ont expliqué leur décision de les diffuser en affirmant que c'était la preuve que les services d'urgence avaient bien réagi dans les circonstances.

Les réseaux CBS, CNN et FOX ont finalement choisi d'en diffuser des extraits alors qu'ABC et NBC se sont abstenus. «Nous comprenons les raisons pour lesquelles certaines personnes s'opposent vivement à la diffusion de ces bandes audio, a déclaré la vice-présidente d'AP, Kathleen Carroll. C'est un crime horrible. Mais il est toutefois important de se rappeler que les bandes du 911, comme tous les documents de la police, sont d'ordre public. Les consulter fait partie de la démarche journalistique d'une entreprise de presse responsable.»

Ce nouveau chapitre dans la couverture médiatique de la tragédie de Newtown arrive alors que la petite ville s'apprête à en souligner le premier anniversaire. Les blessures sont encore fraîches et la peine, palpable.

Hier, un groupe de parents des victimes a imploré les médias de ne pas diffuser les enregistrements du 911, alors que les élus municipaux, eux, déclaraient que cela ajouterait à la peine des résidants du coin.

Dans les réseaux sociaux, les commentaires n'ont pas tardé à fuser, la plupart appuyant la requête des parents de ne pas diffuser les appels dans les médias. Plusieurs personnes affirmaient qu'ils ne les écouteraient pas et se tiendraient loin de la télé et des réseaux sociaux durant quelques jours.

Sensible à la détresse de la petite communauté, la présidente de NBC News, Deborah Turness, a envoyé un mémo à ses employés dans lequel elle disait ceci: «À moins d'un motif très contraignant qui nous forcerait à publier des extraits de ces bandes audio, j'aimerais respecter le souhait des parents de ne pas les diffuser. Cela pourrait causer beaucoup de détresse et nous devons agir avec respect et sensibilité à la veille du premier anniversaire de la tragédie.»