Alassane Ouattara a été investi samedi à Yamoussoukro président de la Côte d'Ivoire et veut «rassembler les Ivoiriens», après six mois d'une crise meurtrière née du refus de l'ex-président Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite à la présidentielle de novembre 2010.

«Le temps est venu de renouer avec les valeurs profondes de notre belle Côte d'Ivoire et de rassembler les Ivoiriens», a dit M. Ouattara lors d'un discours après avoir été solennellement investi devant une vingtaine de chefs d'État africains, principalement de l'Ouest, le président français Nicolas Sarkozy et le chef de l'ONU Ban Ki-moon.

«La Côte d'Ivoire se réconcilie et se rassemble», a-t-il insisté.

Alassane Ouattara, 69 ans, a été intronisé près de six mois après la présidentielle du 28 novembre, perdue par son rival Laurent Gbagbo qui avait refusé de quitter le pouvoir, plongeant le pays dans une grave crise et des violences ayant fait près de 3000 morts selon le nouveau pouvoir.

M. Gbagbo a été arrêté le 11 avril à l'issue de 15 jours de guerre, surtout dans la capitale économique Abidjan, entre ses troupes et celles de M. Ouattara, appuyées de façon décisive par la force française Licorne et celle de l'ONU.

«Ce jour est pour nous un moment historique», a assuré M. Ouattara, se félicitant de «la victoire de la démocratie».

«C'est un succès pour la Côte d'Ivoire et pour l'Afrique toute entières».

Le 3 décembre 2010, le Conseil constitutionnel avait proclamé M. Gbagbo élu avec 51,45% des suffrages, invalidant les résultats de la commission électorale, certifiés par l'ONU et reconnus par la communauté internationale, donnant M. Ouattara vainqueur avec 54,1%.

Le président ivoirien, qui avait prêté serment le 6 mai, a salué l'ONU et «tout particulièrement» la France, ex-puissance coloniale, «avec laquelle la Côte d'Ivoire a des liens historiques et une vision commune de l'avenir», malgré des tensions parfois très fortes sous la décennie Gbagbo.

«M. le président Sarkozy, le peuple ivoirien vous dit un grand merci», a-t-il déclaré sous des applaudissements nourris.

Plus tard, devant la communauté française d'Abidjan, M. Sarkozy a assuré que la France garderait «toujours» des forces militaires dans le pays, dont il n'a pas précisé les effectifs, pour «assurer la protection» de ses milliers de ressortissants.

Les effectifs ayant vocation à rester déployés sur le sol ivoirien pourraient participer à la réorganisation de l'armée ivoirienne, selon la présidence française.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes venues des quatre coins du pays ont fait la fête aux abords de la Fondation

Félix Houphouët-Boigny, où s'est tenue la cérémonie, placée sous haute surveillance des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FCRI) et des Casques bleus de l'Onuci.

«Un grand jour pour la paix, voire l'avènement d'une nouvelle Côte d'Ivoire», se réjouissait Valérie Koffi, étudiante, au milieu des chants et des danses.

À Addis Abeba, l'Union africaine et les ambassadeurs du Conseil de sécurité des Nations unies ont salué aussi l'événement.

Depuis le 11 avril, la Côte d'Ivoire se relève peu à peu: les fonctionnaires ont repris le travail, les écoles ont rouvert et l'activité économique sort de sa paralysie.

Mais le pays reste marqué par les exactions, violences et pillages des derniers mois. Déplacés et réfugiés restent nombreux.

La situation sécuritaire demeure fragile, notamment dans l'Ouest, où des mercenaires libériens pro-Gbagbo en fuite sont accusés par les autorités d'avoir tué plus de 200 personnes début mai. Et policiers et gendarmes tardent à se remettre au travail à Abidjan, toujours contrôlée par les FRCI.

Le nouveau président a promis la réconciliation, créant une Commission ad hoc, mais aussi qu'aucun crime commis depuis le 28 novembre ne resterait impuni. Il a demandé à la Cour pénale internationale (CPI) d'enquêter sur les crimes les plus graves.