La Commission vérité et réconciliation (TRC) sud-africaine a entendu plus de 21 000 témoignages de bourreaux et victimes de la période d'apartheid, une catharsis collective qui pourrait servir d'exemple à la Côte d'Ivoire du président Alassane Ouattara.

En 1995, un an après l'élection de Nelson Mandela à la présidence, l'Afrique du Sud a mis sur pied cette commission pour explorer ses «peurs» et ses «douleurs» après le traumatisme de l'apartheid.

«Nous avons pour mission de faire éclater la vérité sur notre sombre passé, d'enterrer les fantômes pour qu'ils ne reviennent pas nous hanter», déclarait alors son président, le prix Nobel de la Paix Desmond Tutu.

Pendant trois ans, ses seize membres ont tenu des auditions publiques dans l'ensemble du pays pour recueillir la parole des auteurs de violences politiques, commises entre 1960 et avril 1994, et celles de leurs victimes.

Si les crimes étaient politiques, les bourreaux pouvaient en échange d'aveux complets et d'excuses publiques obtenir une amnistie. Si leurs témoignages étaient édulcorés, ils retombaient dans le système judiciaire classique.

Au total, plus de 7000 auteurs de violences politiques ont demandé pardon, mais seulement 850 l'ont obtenu.

Pour éviter la polarisation de la société, la Commission a enquêté sur les crimes commis par le camp du régime d'apartheid, mais aussi par ses opposants, notamment du Congrès national africain (ANC) de Nelson Mandela.

Parmi les témoignages les plus proéminents, le tortionnaire du régime blanc Eugene de Kock a révélé à la barre comment des dizaines de militants ANC avaient été torturés et tués par la police secrète.

Avec réticence, la flamboyante Winnie Mandela, l'ex-femme du président, a également comparu devant la commission en raison de violences commises par ses partisans dans les dernières années de l'apartheid.

Par ailleurs, le processus ouvrait la porte à une système de compensations pour les victimes ou leurs familles.

Le modèle de la TRC sud-africaine est généralement loué pour ses vertus de thérapie collective et a été depuis appliqué dans de nombreux pays, dont le Burundi ou le Liberia.

Mais en Afrique du Sud, il a laissé certains frustrés. La plupart des leaders de l'apartheid, dont l'ancien président PW Botha, ont refusé de témoigner, donnant l'impression que seuls les seconds couteaux étaient exposés.

Du côté des victimes, les compensations ont souvent été jugées trop faibles, et trop longues à venir.

La famille de Steve Biko, le leader du Mouvement de la consience noire tué en 2007 par la police, s'est également opposée à un processus qui lui «volait» le droit à réparation.