Il y a actuellement des «tractations» au sujet de Laurent Gbagbo mais «pas encore de reddition» du président sortant ivoirien, a affirmé mardi la présidence française à l'AFP.

Le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé a indiqué peu après 20H00 (18H00 GMT) sur la chaîne France 2 qu'«il y a aujourd'hui, en ce moment même (...) des tractations» entre Laurent «Gbagbo et ceux qui l'entourent encore», le représentant du secrétaire général des Nations unies Choi Young-jin et l'ambassadeur de France en Côte d'Ivoire.

Interrogé peu auparavant lors de son audition à l'Assemblée sur la possibilité pour le président ivoirien sortant de rester en Côte d'Ivoire, M. Juppé avait répondu: «C'est aux autorités ivoiriennes d'en décider. Nous avons demandé à l'Onuci d'assurer sa sécurité physique et celle de sa famille».

Son collègue à la Défense, Gérard Longuet, avait de son côté affirmé, également devant l'Assemblée, que les proches de Laurent Gbagbo pourraient être accueillis par d'autres pays africains.

Dernières heures

Le régime de Laurent Gbagbo vit en tout cas ses dernières heures. La résidence du président ivoirien sortant, à Abidjan, a été attaquée mardi par les combattants de son rival Alassane Ouattara et le chef de son armée affirme avoir « arrêté les combats » et demandé un cessez-le-feu.

Après des jours de combats à l'arme lourde qui ont fait des «dizaines de morts» à Abidjan selon l'ONU, et une sanglante crise post-électorale de quatre mois, les armes s'étaient tues dans la métropole ivoirienne, mais les habitants restaient suspendus à l'annonce de la fin de l'ère Gbagbo.

«Retranché» d'après les Nations unies dans un «bunker» au sous-sol de sa résidence, autour de laquelle avaient convergé les combattants du président reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo négociait les conditions de son départ.

Le président américain Barack Obama a appelé l'ex-homme fort d'Abidjan à «démissionner immédiatement», soutenant «fermement» les frappes de l'ONU et de la France lundi sur ses derniers bastions.

Ces bombardements sur l'armement lourd des forces pro-Gbagbo avaient précipité l'effondrement de son régime, après plus d'une décennie de pouvoir et huit jours d'une offensive éclair des forces pro-Ouattara, venues du Nord.

Ministre des Affaires étrangères de M. Gbagbo et proche parmi les proches, Alcide Djédjé jouait un rôle-clé dans l'épilogue en cours.

Il s'est rendu chez l'ambassadeur de France, dont la résidence jouxte celle de M. Gbagbo, pour négocier un cessez-le-feu «à la demande», selon lui, du sortant.

Le chef d'état-major de l'armée loyale à M. Gbagbo, le général Philippe Mangou, a peu après déclaré à l'AFP que ses troupes avaient «demandé au général commandant (la mission onusienne) Onuci un cessez-le-feu». «Nous avons arrêté les combats», a-t-il ajouté.

L'ex-opposant au «père de la Nation» Félix Houphouët-Boigny, devenu président en 2000 lors d'un scrutin déjà contesté, n'a jamais reconnu sa défaite à la présidentielle du 28 novembre 2010, un vote pourtant certifié par l'ONU. Il avait toujours refusé d'abdiquer ou de partir en exil.

Chaos

Mais la résistance acharnée de ses troupes à Abidjan, qui comptait avant la crise environ 5 millions d'habitants, a plongé la ville dans le chaos.

Le Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a fait état de «dizaines de morts» ces derniers jours dans des combats à l'arme lourde.

«La situation humanitaire s'est encore détériorée et est devenue absolument dramatique à Abidjan», pour le Bureau de coordination des Affaires humanitaires des Nations unies.

Le président en exercice de l'Union africaine, le chef de l'Etat équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, a condamné l'intervention de l'ONU et de la France. La Russie, membre permanent du Conseil de sécurité, a dit «étudier la légalité» de ces frappes.