Les 115 cardinaux électeurs ont participé mardi matin à une messe solennelle à la basilique Saint-Pierre, marquée par un tonnerre d'applaudissements en hommage à Benoît XVI, avant de commencer dans l'après-midi un conclave historique pour élire son successeur.

Au début de cette messe «pro eligendo pontifice» (pour l'élection du pontife romain), sur fond de chants grégoriens, les cardinaux ont défilé solennellement en habit pourpre et coiffés de leur mitre dans l'allée centrale de la plus grande église de la chrétienté.

Les 115 électeurs et la centaine de prélats ayant dépassé les 80 ans, qui ne participeront donc pas au conclave, se sont ensuite assis en arc de cercle autour du baldaquin à colonnes torsadées du Bernin, qui se trouve au-dessus du tombeau de Saint Pierre.

Lorsque le cardinal Angelo Sodano, doyen du Sacré Collège, a prononcé dans son homélie le nom de l'ex-pape, un tonnerre d'applaudissements a retenti pendant une minute dans la basilique et sur la place.

Des milliers de fidèles avaient en effet afflué dès 7 h GMT (3 h, heure de Montréal) sur la place enserrée par la célèbre colonnade du Bernin, afin de pouvoir assister à cette messe de 1 h 40, retransmise sur quatre écrans géants.

Parmi eux, Graziano Toto, un Romain de 68 ans, qui estime que «la priorité du nouveau pape sera de mettre de l'ordre dans la curie, dans les dicastères (ministères)».

«Il faut qu'il puisse changer les choses, aborder des sujets comme la place des femmes dans l'Église ou encore le célibat des prêtres», espère de son côté Christine Hinterstoiber, une Bavaroise de 58 ans.

Dans la basilique, le cardinal Sodano a exhorté les cardinaux à «travailler tous ensemble pour construire l'unité de l'Église» et à «coopérer avec le successeur de Pierre». Il a cité une épître de Saint-Paul : «Ayez beaucoup d'humilité, de douceur et de patience, soutenez-vous les uns les autres avec amour». À la fin de la messe, les cardinaux sont repartis de la basilique en procession.

Auparavant, de bon matin - 6 h GMT (2 h à Montréal) -, les princes de l'Église ont emménagé à la Maison Sainte-Marthe, un ancien hospice situé derrière la basilique où ils habiteront jusqu'à l'élection du nouveau chef d'une Église de 1,2 milliard de fidèles.

Pierre Durieux, porte-parole du cardinal français Philippe Barbarin, a tweeté pour annoncer l'entrée des trois cardinaux français au Vatican. Et maintenant «grand silence», a-t-il écrit.

Dans l'après-midi, vers 15 h 30 GMT (11 h 30 à Montréal), ils partiront en procession, au chant de la litanie des Saints, jusqu'à la Chapelle Sixtine, peinte par Michel-Ange. Là, chacun d'eux devra, la main posée sur l'Évangile, «jurer de garder le secret absolu sur tout ce qui concerne directement ou indirectement les votes et les scrutins pour l'élection du souverain pontife».

Selon un rituel immuable et strict, hérité du Moyen-Âge, les portes seront ensuite fermées «à clé» (d'où l'origine du nom de «conclave»).

Totalement coupés du monde, les cardinaux procèderont probablement au premier vote pour désigner le successeur de Benoît XVI, après sa démission spectaculaire et historique.

Quatre scrutins sont prévus chaque jour, deux en matinée et deux l'après-midi.

Tous les bulletins seront brûlés en fin de journée pour effacer toute trace de scrutins très secrets dont les cardinaux ne peuvent faire état. Grâce à l'adjonction de fumigènes, s'échappera une fumée noire si aucun pape n'est élu, blanche en cas d'élection.

Selon les vaticanistes, et sauf surprise, le conclave qui s'ouvre devrait être court, de deux à quatre jours au maximum.

Sur les 115 électeurs, tous créés par Jean Paul II ou Benoît XVI, une dizaine étaient cités ces derniers jours comme des «papabili», autrement dit des «papes possibles».

De l'Italien Angelo Scola au Québéxois Marc Ouellet, du Brésilien Odilo Scherer à l'Autrichien Joseph Schönborn et au Hongrois Peter Erdö et aux Américains Timothy Dolan et Sean O'Malley, tous ont des ressemblances évidentes avec leurs mentors. Ils sont tous conservateurs, plus soucieux d'empêcher que la foi se dilue que d'engager des réformes de société, attendues par beaucoup, notamment en Occident.

«Guidés par l'Esprit Saint», les cardinaux devront choisir celui qui sera à même d'affronter la crise que traverse la curie romaine, le gouvernement de l'Église, marqué par le scandale des fuites Vatileaks et par des spéculations sur un prétendu «lobby gai».

Il devra aussi s'attaquer aux défis de la sécularisation des sociétés occidentales et des persécutions de chrétiens dans le monde.

L'élection du 266e pontife clôt un mois mouvementé, entamé le 11 février avec l'annonce-surprise par Benoît XVI de sa démission à l'âge de 85 ans. Premier pape vivant à assister à l'élection de son successeur, Joseph Ratzinger suivra le processus de loin.

Depuis le 28 février, le «pape émérite» s'est retiré dans la résidence d'été des papes, à Castel Gandolfo, à une trentaine de kilomètres de la Ville éternelle.

 

 

PHOTO GABRIEL BOUYS, AFP

Les 115 électeurs et la centaine de prélats ayant dépassé les 80 ans, qui ne participeront donc pas au conclave, se sont ensuite assis en arc de cercle autour du baldaquin à colonnes torsadées du Bernin,