Vladimir Poutine a dissipé mardi le mystère sur Edward Snowden, l'ex-consultant de la NSA recherché par les États-Unis, en annonçant qu'il se trouvait toujours en zone de transit à l'aéroport de Moscou, et que la Russie n'allait pas l'extrader aux États-Unis.

«M. Snowden est effectivement arrivé à Moscou. Pour nous, c'était totalement inattendu», a annoncé le président russe.

L'Américain, âgé de 29 ans, à l'origine de spectaculaires révélations sur l'espionnage par l'Agence nationale de sécurité (NSA) américaine de communications téléphoniques et Internet aux États-Unis et à l'étranger, était invisible depuis dimanche, jour où selon la presse il avait quitté Hong Kong pour Moscou.

«Il est arrivé en tant que passager de transit et en tant que tel il n'a pas besoin de visa ni d'autres documents», a poursuivi M. Poutine, au cours d'une conférence de presse à Turku, en Finlande.

Le président russe s'est ensuite empressé de souligner que la Russie n'avait aucun accord d'extradition avec les États-Unis, qui réclament expressément le jeune homme.

C'est «un homme libre. Plus vite il choisira sa destination finale, mieux ce sera, et pour nous et pour lui», a déclaré M. Poutine, excluant manifestement toute mesure à l'encontre de M. Snowden, alors que les relations avec Washington se sont nettement tendues autour de cette affaire.

«Bien que nous n'ayons pas d'accord d'extradition avec la Russie, il existe néanmoins une base juridique claire pour renvoyer M. Snowden» aux États-Unis, a toutefois réagi la porte-parole de la Maison Blanche pour la sécurité nationale, Caitlin Hayden.

«Nous demandons au gouvernement russe d'agir pour expulser M. Snowden sans délai et de se fonder sur la solide coopération existant entre nos forces de l'ordre, en particulier depuis les attentats du marathon de Boston», le 15 avril dernier, a-t-elle ajouté.

Dimanche, les rumeurs s'étaient multipliées sur le fait que l'Américain, qui s'était réfugié à Hong Kong le 20 mai, était arrivé ce jour-là à l'aéroport de Cheremetievo à Moscou par un vol de la compagnie Aeroflot. Il n'avait toutefois été vu par personne et il n'y avait eu aucune confirmation officielle de sa présence en Russie.

Néanmoins, lundi, le secrétaire d'État américain John Kerry avait menacé la Chine et la Russie de conséquences sur leurs relations avec Washington, jugeant «très décevant» le fait que l'ancien consultant de la NSA, ait pu se rendre de Hong Kong à Moscou.

Ces déclarations ont été vigoureusement rejetées, à la fois par Pékin et par Moscou.

«Les accusations contre le gouvernement central chinois sont sans fondement», a déclaré mardi le porte-parole de la diplomatie chinoise, Mme Hua Chunying, alors que le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, jugeait lui «tout à fait infondées et inacceptables les tentatives d'accuser la Russie d'avoir violé les lois des États-Unis».

«Toutes les accusations à l'encontre de la Russie sont du délire et des sornettes», a renchéri Vladimir Poutine, ajoutant que les services de sécurité russes n'avaient jamais travaillé et ne travaillaient pas actuellement avec M. Snowden.

Inculpé d'espionnage par les États-Unis, ce dernier encourt 30 ans de réclusion dans son pays.

Après son arrivée présumée dans la capitale russe, des sources avaient indiqué qu'il devait prendre lundi un avion pour Cuba, avant de rejoindre l'Equateur où il a fait une demande d'asile politique.

Mais Edward Snowden n'est jamais monté à bord, déclenchant une vague de rumeurs et d'informations contradictoires.

M. Snowden est «en bonne santé et en sécurité», avait pour sa part seulement affirmé le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, dans une conférence par téléphone à l'ambassade d'Equateur à Londres, où il est lui-même est réfugié depuis un an.

Le président équatorien, Rafael Correa, a annoncé lundi que son pays étudiait la demande d'asile d'Edward Snowden.

A cet égard, «le département d'État des États-Unis a envoyé un message au gouvernement d'Equateur, à notre ministère des Affaires étrangères à Quito, à propos de M. Snowden», a fait savoir le ministre équatorien des Affaires étrangères, Ricardo Patiño.

L'Equateur a déjà accordé l'asile à Julian Assange, lui-même recherché par les États-Unis pour avoir publié en 2010 des centaines de milliers de documents diplomatiques confidentiels.

Mardi, le Venezuela a lui aussi fait savoir qu'il était prêt à examiner une éventuelle demande d'asile d'Edward Snowden.

«Nous n'avons pas reçu de demande officielle, mais si c'était le cas, nous l'étudierions», a assuré le président vénézuélien Nicolas Maduro lors d'une visite en Haïti.

Très remontée contre Hong Kong, qui a laissé partir M. Snowden officiellement pour des raisons juridiques, la Maison Blanche avait fermement demandé lundi à la Russie d'«étudier toutes les options à sa disposition pour expulser M. Snowden vers les États-Unis».

Des sources informées avaient indiqué lundi à l'agence de presse Interfax que Moscou étudiait une demande d'extradition présentée par les États-Unis.

Mais une autre source avait aussitôt précisé que le jeune homme ne pourrait être interpellé étant donné qu'il n'avait pas franchi la frontière russe, des propos allant dans le sens de ceux de M. Poutine.

«Snowden pourrait rester en permanence en Russie à cause de l'annulation de son passeport et du harcèlement des pays intermédiaires», a pour sa part déclaré WikiLeaks sur son compte Twitter.

L'affaire risque d'aggraver les tensions entre la Russie et les États-Unis à un moment où les deux pays tentent de trouver une solution pour mettre fin au conflit en Syrie.

John Kerry et Sergueï Lavrov devraient néanmoins se rencontrer la semaine prochaine à Brunei, a annoncé mardi le service de presse du ministère russe des Affaires étrangères.