Les services britanniques de renseignement ont un accès à des câbles à fibres optiques qui en font un acteur majeur dans la surveillance des communications mondiales, selon des documents dévoilés par Edward Snowden au Guardian qui ont indigné les défenseurs des libertés individuelles.

Selon l'ex-consultant, inculpé pour espionnage aux États-Unis pour avoir divulgué des programmes américains de surveillance des communications, ce phénomène n'est «pas juste un problème américain».

«Le Royaume-Uni joue un rôle majeur», a déclaré Snowden, cité samedi par le Guardian. «Ils sont pires que les Américains», ajoute-t-il même à propos du Quartier général des communications du gouvernement (GCHQ), service britannique des écoutes.

Le GCHQ a quant à lui assuré respecter «scrupuleusement» la loi. «Nous ne faisons pas de commentaires sur les questions touchant au renseignement. Nos agences de renseignement continuent à agir en respectant un strict cadre légal», a déclaré une porte-parole de l'agence britannique, basée à Cheltenham (centre).

Selon le journal britannique, GCHQ a obtenu un accès aux câbles transatlantiques à fibres optiques qui permettent le trafic internet et les appels téléphoniques, par des «accords secrets» avec des entreprises privées, et partage les données ainsi rassemblées avec l'Agence de sécurité nationale américaine (NSA).

Les données récupérées peuvent être stockées pendant une période allant jusqu'à 30 jours par l'agence britannique à des fins d'analyse, dans le cadre d'une opération portant le nom de code «Tempora», qui a commencé il y a 18 mois, rapporte le journal.

Le directeur de la commission parlementaire britannique chargée du renseignement et de la sécurité, Malcolm Rifkind, a indiqué s'attendre à avoir une réponse de la part de GCHQ sur cette affaire dans les prochains jours.

«La question cruciale n'est pas tant de savoir quelle quantité de données (GCHQ) peut en théorie collecter, mais ce à quoi il peut avoir accès, s'il s'agit d'une intrusion dans la vie privée des citoyens», a-t-il résumé sur la BBC, ajoutant que la commission pouvait décider le cas échéant d'entendre directement le directeur de GCHQ et de se pencher sur «tout document permettant de tirer au clair la situation».

L'opposition travailliste a estimé que les informations du Guardian soulignaient «l'urgence et l'importance du travail sur cette question de la commission sur le renseignement et la sécurité», tandis que les militants pour la protection de la vie privée ont exprimé leur inquiétude.

«Si GCHQ a intercepté un grand nombre de communications de personnes innocentes dans le cadre d'une opération de large envergure, je vois mal comment cela peut coller avec la procédure qui prévoit une autorisation (gouvernementale) pour chaque interception de communication individuelle», a déclaré le directeur de l'association Big Brother Watch, Nick Pickes.

«Cette question doit de façon urgente être abordée au Parlement», a-t-il dit.

Shami Chakrabarti, directrice de Liberty, autre association de protection des libertés individuelles, s'est dit «choquée mais pas surprise» des informations du Guardian et accusé GCHQ d'avoir «une interprétation très généreuse de la loi». «Ils exploitent le fait que l'internet est international par nature», a-t-elle estimé sur la BBC.

Selon le Guardian, les données obtenues incluent des enregistrements de conversations téléphoniques, le contenu de courriels, de messages sur Facebook, l'historique de l'activité en ligne d'un internaute.

Les documents consultés par le Guardian montrent qu'en 2012, l'agence britannique avait accès à plus de 200 câbles à fibres optiques et pouvait traiter 600 millions de communications téléphoniques chaque jour.

Les deux principales composantes du programme de surveillance de GCHQ sont «Maîtriser l'internet» («Mastering the Internet») et «Exploitation des télécommunications mondiales» («Global Telecoms Exploitation») et sont, indique le Guardian, menées sans «que le public en ait eu la moindre connaissance ou qu'il y ait eu le moindre débat».