Les Haïtiens se sont recueillis jeudi à l'occasion du deuxième anniversaire du séisme qui a tué plus de 200 000 des leurs, sans grand espoir d'une amélioration rapide des conditions de vie des sinistrés qui seraient encore plus d'un demi-million.

Les églises étaient prises d'assaut dès le début de la journée. Dans les rues de la capitale, dont des quartiers entiers sont encore recouverts de décombres, des cérémonies étaient organisées pour commémorer la catastrophe du 12 janvier 2010, lorsqu'une énorme secousse de magnitude 7 a dévasté Port-au-Prince et sa région.

Administrations, écoles et commerces étaient fermés pour la journée. À l'intérieur de la cathédrale toujours en ruines, des fidèles, souvent vêtus de blanc, venaient prier et revoir des photos du drame accrochées au mur du bâtiment ouvert à tous les vents.

«Je n'arrive pas à me détacher de cet endroit où j'ai perdu mes deux jambes. Cela fait deux ans que je vis ici», témoignait Jean Wilbert, 40 ans, un cul-de-jatte installé avec sa mère dans un campement de fortune à l'extérieur de la cathédrale.

Au son de la sonnerie aux morts, qui a retenti pendant 35 secondes, soit la durée du séisme, à 16h53, heure exacte de la catastrophe, le président Michel Martelly a déposé une gerbe au nord de Port-au-Prince devant l'immense fosse commune où la plupart des victimes ont été enterrées par camions entiers dans les jours qui ont suivi la catastrophe.

«Pendant deux années nous avons pleuré nos défunts, pansé nos blessures, il nous faut maintenant reconstruire autrement, mais il nous faut aussi déconstruire certaines habitudes, nous approprier d'autres valeurs et désamorcer tout risque de retour à l'horreur», a-t-il déclaré.

Sur le palais présidentiel en ruines, le drapeau national était en berne face au Champ-de-Mars, la grande esplanade du coeur de la ville qui sert toujours de campement pour des milliers de sinistrés.

La reconstruction traîne en longueur

Dans toute la ville, des petits groupes défilaient dans le calme, souvent accompagnés de musique religieuse. Certains manifestants, encadrés par des organisations de défense des droits de l'homme, tenaient des pancartes où l'on pouvait lire «Donnez-nous des maisons décentes pour vivre» ou «Après deux ans, trop c'est trop».

La reconstruction de la capitale et de sa région est loin d'avoir commencé et, selon l'ONU, 520 000 sinistrés vivent toujours dans des camps, soit environ la moitié du nombre de sans-abri évalué dans les jours qui ont suivi le séisme.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a appelé la communauté internationale à «maintenir son aide vitale» au pays, frappé, outre le séisme, par une épidémie de choléra qui a tué plus de 7000 personnes depuis la fin de 2010.

Pour les Nations unies, «les signes de progrès et les résultats positifs se multiplient», la moitié des décombres ayant été déblayés, soit plus de 5 millions de m3 de gravats.

Après des mois d'atermoiements, les autorités ont mis en place un programme visant à inciter les sinistrés à quitter les places du centre-ville et à regagner leurs quartiers d'origine avec une aide de 500$ par an et par famille pour louer un logement.

Josef Leitmann, un responsable du Fonds pour la reconstruction d'Haïti, une émanation de la Banque mondiale, se félicite que l'État ait «une vision» de l'avenir. «Les autorités veulent la communiquer à la population et ont la volonté politique de la mettre en oeuvre», assure-t-il.

Haïti reste cependant encore largement dépendant de l'aide internationale: le Programme alimentaire mondial (PAM) se félicite d'avoir amélioré la sécurité alimentaire du pays mais continue à apporter chaque jour son aide à 1,5 million de personnes, essentiellement des écoliers et des jeunes mamans. Après le séisme, c'était 4 millions d'Haïtiens, près de la moitié de la population du pays, qui avaient reçu l'aide d'urgence du PAM.