Il n'a plu qu'une demi-heure, mais pour les dizaines de milliers de sans-abri de Port-au-Prince, c'est une nouvelle «catastrophe» un mois après le tremblement de terre. Leurs abris de fortune n'ont pas résisté et le peu d'affaires qu'ils avaient récupérées sont souillées.

Quand les gouttes ont traversé les bouts de tissu plastifiés qui servent de toit à sa famille, le petit-fils de Marie-Saint-Fleur Norvely «s'est mis à pleurer parce qu'il était frigorifié». Heureusement, au milieu des gîtes improvisés de bric et de broc dans le campement, son voisin, Roland Desil, a une vraie tente.

«Les enfants sont allés dans la tente et une voisine m'a prêté une tôle pour me protéger», raconte cette femme au sourire philosophe, réfugiée seule avec ses six enfants au Champ de Mars, l'esplanade du coeur de la capitale haïtienne transformée en gigantesque campement. Son mari est resté dans leur maison, dangereusement fissurée par le séisme du 12 janvier.

Au milieu de casseroles remplies d'eau de pluie, elle est assise sur le sol humide, affairée à coudre des bâches en plastique «pour se protéger davantage contre la pluie» la prochaine fois.

Responsable d'une unité de soins mobiles pour Helping Hands, une association américaine, Richard Kowalske confirme avoir reçu tôt le matin «beaucoup d'enfants qui ont eu froid et ont attrapé un rhume». «Avec la pluie, ça va devenir de plus en plus difficile car les maladies vont se propager», prédit le médecin, disant craindre davantage de cas de typhoïde.

Quelques mètres plus loin, une femme évacue au balai les flaques d'eau restées après l'averse. Le liquide marronnasse échoue sur un tas de détritus voilé de mouches.

En s'enfonçant davantage à l'intérieur du camp, c'est une mare de boue.

Démosthène Wisler, 23 ans, montre son abri de fortune. Quelques mètres carrés de sol détrempé. Les vêtements que sa femme, sa belle-soeur et lui portaient cette nuit pendouillent sur un poteau, encore mouillés. Ils ont essayé de surélever tant bien que mal, sur une valise déchirée ou une cuvette, les chaussures, vêtements ou papiers emportés à la va-vite de leur maison, fissurée.

«Ce matin, j'étais mobilisé, je suis allé à la manifestation, à 6H00 du matin, on y a tous été pour demander qu'on nous aide a trouver une tente», explique-t-il.

«Nous n'avons jamais vu un dirigeant, ou un Haïtien, pour nous donner une tente», dit Démosthène, qui survit en achetant 50 gourdes (environ 1 dollar) et revendant 60 gourdes les petits sachets de 20 ml d'eau potable qui circulent partout dans la ville.

En face, l'abri d'Yves-Robert Isidore et sa famille n'a même pas de bâche de protection. Le même sol détrempé, les vêtements posés les uns sur les autres, à la va-vite sur un fil tendu. «Tout le monde a été réveillé, on a essayé de protéger nos affaires», raconte cet homme de 40 ans au regard perdu.

«C'est une petite pluie qui nous a mis dans cette situation là !», s'exclame-t-il, redoutant la saison humide attendue au printemps.