Le palais national effondré, une administration publique à terre, le gouvernement d'Haïti a été sévèrement touché lors du séisme qui a fait plus de 217 000 morts il y a tout juste un mois, dont de nombreux cadres de l'État.

Le président René Préval a beau répéter que l'État ne s'est pas effondré, la destruction des principales structures de la capitale, dont une dizaine de ministères, a mis à nu la faiblesse d'un pays, le plus pauvre du continent américain.

Plus de 60 000 employés de la fonction publique sont au chômage forcé depuis le 12 janvier et les principaux organismes de l'État ne fonctionnent pas depuis un mois.

Le chef de l'État haïtien a depuis un mois pris ses quartiers dans un modeste commissariat de police proche de l'aéroport international de Port-au-Prince. «J'ai choisi cet endroit pour être plus près des amis qui viennent nous voir et pour recevoir l'aide humanitaire», a expliqué M. Préval.

Désemparé, le gouvernement haïtien a remis aux États-Unis les clés de l'aéroport de Port-au-Prince dans les jours qui ont suivi le séisme. Washington s'est retrouvé de facto aux commandes de l'organisation et de la distribution des secours avec les quelque 20 000 soldats envoyés sur zone.

Les soldats américains se sont efforcés de sécuriser la distribution de l'aide au moment où le pays sombrait dans le chaos, les pillards parcourant les rues pendant que des milliers de détenus profitaient de l'effondrement de la prison de Port-au-Prince pour recouvrer la liberté.

Dans plusieurs pays d'Amérique latine, les États-Unis ont été accusés de chercher à envahir leur petit voisin en profitant du chaos provoqué par le tremblement de terre. Le pouvoir haïtien a démenti avoir bradé la souveraineté du pays.

Secoué par l'ampleur du séisme, le président haïtien, dont la résidence officielle a été également détruite, a dû faire face très vite à la colère des Haïtiens impatients face à la lenteur des secours.

Des groupes de manifestants n'ont pas hésité à chahuter un président très critiqué pour son mutisme. Sur certains murs de la capitale, des graffitis invitent le président à démissionner.

«Nous les Haïtiens, on adore Chavez et Obama», explique à l'AFP Frank Royemon, un jeune homme dont le bon niveau d'anglais lui a valu d'être enrôlé comme interprète par une équipe de journalistes américains. «Ca dépend des jours: un jour on préfère Obama, l'autre c'est Chavez. C'est eux qui devraient être notre président», ajoute-t-il.

«La situation n'est pas facile pour vous, elle ne l'est pas non plus pour le gouvernement qui travaille dans des conditions difficiles», se défend le président Préval, qui a invité ses concitoyens à la discipline afin de construire un nouveau pays décentralisé.

Au début, les conseils des ministres se réunissaient sous des arbres du commissariat, pour échapper à un éventuel effondrement en cas de réplique. Aujourd'hui, le premier ministre Jean-Max Bellerive a distribué des tâches spécifiques à son gouvernement. Celui du Tourisme a ainsi été chargé de la reconstruction.

«Il ne s'agit pas de rebâtir ce qui a été détruit. Il s'agit de repenser un pays», a expliqué M. Bellerive dans un entretien à l'AFP. «Il faut reconstruire mieux, différemment, autrement. C'est-à-dire respecter les procédures de construction, respecter l'autorité de l'État».