La violence est bel et bien revenue dans les rues de Cité-Soleil, ce bidonville extrêmement pauvre de Port-au-Prince. Les gangs se battent pour reprendre le contrôle du territoire. Après 17h, tous les jours, des coups de feu se font entendre dans le quartier. L'hôpital local a accueilli 10 patients atteints par balle dans la seule journée de vendredi.

La guerre des gangs est si violente que la distribution massive de nourriture que le Programme alimentaire mondial (PAM) devait tenir hier à Cité-Soleil a été annulée. «On ne pouvait pas y aller. Le problème des gangs est devenu trop fort», affirme la responsable des communications du PAM à Port-au-Prince, Natasha Scripture.

À l'entrée de Cité-Soleil, la MINUSTAH a garé un immense char d'assaut. Quelques soldats patrouillent aussi dans les rues. L'ambiance est tendue. Depuis le tremblement de terre, la prison s'est effondrée, laissant plusieurs bandits en liberté.

La guerre des gangs, qui s'était estompée dernièrement, ressurgit aujourd'hui. Renaud Sander, psychologue à l'hôpital de Chauscal dans Cité-Soleil, confirme que les gangs sont revenus. «La nuit, on entend des tirs. On a reçu 10 blessés par balle vendredi», dit-il.

Responsable du comité local de la Croix-Rouge à Cité-Soleil, Pierre Alexis affirme que le quartier est redevenu très dangereux depuis le tremblement de terre. «Le jour, c'est très dangereux. Le soir, c'est fou», résume-t-il.

Dans son local situé dans une minuscule ruelle de Cité-Soleil, M. Alexis reçoit tous les jours des citoyens blessés par balle. «Les gens hésitent à aller à l'hôpital. Ils ne font pas toujours confiance aux Blancs. Ils viennent ici», rapporte-t-il.

Rencontré dans la rue alors qu'il discutait avec des amis sur le trottoir, Pierre, un résidant de Cité-Soleil qui préfère taire son nom, dit craindre le retour des gangs. «On avait enfin retrouvé un peu de paix. Là, on est encore pris avec ce problème. J'espère que l'armée pourra régler ça.»

Samedi après-midi, des camions de la MINUSTAH se promenaient dans le secteur. À bord, des soldats criaient dans un haut-parleur. Ils donnaient des numéros de téléphone pour les joindre si jamais des incidents fâcheux survenaient.

Observant la scène, la vendeuse de saucisses Aria Francis rit en regardant passer les soldats. «Ce n'est pas si pire ici. Oui, les tirs sont revenus. Mais on est habitués», dit-elle en retournant ses saucisses.