Alors qu'un nouveau bilan porte le nombre de morts à 170 000, les pillages semblent encore s'intensifier mercredi à Port-au-Prince, deux semaines après le séisme qui a détruit la capitale haïtienne.

L'ONU s'alarme de la menace des chefs de gangs évadés, des trafiquants d'enfants et autres délinquants. 

Pillages et récupérations prennent un aspect systématique.

Ce mercredi, des habitants parcouraient les rues avec des brouettes, récupérant des matériaux, essentiellement du bois et du métal prélevé sur des bâtiments effondrés. À proximité, des commerçants continuaient à charger des camions à l'aide de produits récupérés dans leurs boutiques avant le passage annoncé des bulldozers qui doivent déblayer les bâtiments, effondrés ou non.

Près du palais présidentiel en ruines que la France devrait reconstruire à l'identique, comme l'a annoncé mercredi le président haïtien René Préval, des milliers de sinistrés se plaignaient de la faim malgré les distributions de vivres assurées par la communauté internationale, souvent dans la bousculade.

«Je ne vais pas me battre dans la rue pour un petit peu de nourriture», confiait Immacula Cadet, qui hausse les épaules quand on lui demande ce qu'elle a mangé ce matin ou la veille. «De l'eau, un peu de jus de fruit».

Dans toute la ville, des panneaux fléchés s'adressaient aux sauveteurs en français, en anglais ou en espagnol. «Nous avons besoin d'aide, de nourriture, d'eau, de médicaments», dit l'un d'entre eux à l'entrée d'un camp de sinistrés.

Haïti compte au moins un million de sans-abri depuis le séisme.

400 000 tentes

À Croix-des-Bouquets, à une trentaine de kilomètres de la capitale, un terrain prévu par les autorités pour installer une «mini-ville» de sinistrés n'accueillait pas la moindre tente. Le ministre de la Santé d'Haïti, Alex Larsen, a indiqué lundi que les autorités disposaient de 400 000 tentes familiales pouvant chacune accueillir entre cinq et dix personnes.

La sécurité des sinistrés inquiétait les Nations unies. A Genève, la Haut commissaire de l'ONU pour les droits de l'homme, Navi Pillay, a exprimé ses «craintes que des prisonniers évadés des prisons d'Haïti, dont des gangsters endurcis, puissent se procurer des armes et s'engagent dans des activités criminelles violentes».

Elle a également fait état d'informations «alarmantes sur des exécutions sommaires (de criminels présumés) par des foules en colère».

«La situation actuelle en Haïti est un environnement favorable pour les trafiquants, ceux qui fournissent des adoptions illégales, ou d'autres qui veulent profiter de la situation», a averti l'Unicef.

Le président haïtien a annoncé mercredi que les cadavres de «près de 170 000» victimes ont déjà été ramassés, un chiffre supérieur aux 150 000 morts évoqués dans les dernières estimations.

Il a évoqué la possibilité d'un report des élections législatives prévues fin février en raison du séisme, et a précisé que 225 000 habitations et 25 000 bâtiments de commerce ont été détruits totalement ou partiellement.

Selon une étude publiée mercredi aux États-Unis, près de la moitié des quelque 250 000 blessés du séisme seraient des enfants.

Les États-Unis ont dépêché quelque 20 000 soldats sur zone pour organiser les secours. Mercredi, Ronald Waldman, le coordinateur de l'action sanitaire menée par ce pays a indiqué que 11 600 blessés avaient été pris en charge jusqu'à maintenant par les services des départements de la défense et de la santé américains.

L'amiral Ted Branch, commandant du Carl-Vinson, porte-avions américain d'où une partie de l'aide est distribuée et où des blessés sont opérés, a indiqué mercredi que les hélicoptères de la Navy avaient notamment livré 160 tonnes de nourriture ainsi que de l'eau et des fournitures médicales.

Dans le sud du pays, l'aéroport de Jacmel, a été remis en service mardi par le Canada. Cet aéroport doit permettre de désengorger l'aide humanitaire qui arrive à Port-au-Prince.

Le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé mercredi que son conseil d'administration avait approuvé le versement d'ici à la fin de la semaine de 114 millions de dollars à Haïti.