Le Venezuela et la Bolivie ont à nouveau violemment critiqué mercredi le déploiement militaire des Etats-Unis en Haïti, où 15 000 soldats américains doivent être déployés dans le pays caribéen frappé le 12 janvier par un violent séisme qui a fait 75 000 morts.

L'«empire» américain «s'empare d'Haïti sur les cadavres et les larmes de son peuple», a accusé mercredi le président socialiste vénézuélien Hugo Chavez.

«Ils ont commencé par l'aéroport», a affirmé le chef de file de la gauche radicale latino-américaine, ajoutant: «si vous voulez pénétrer dans les ruines du palais présidentiel d'Haïti, là se trouvent les Marines des Etats-Unis».

Mardi, des soldats américains avaient pris position près du palais présidentiel dans le cadre de leurs opérations d'aide aux victimes.

«Ils se sont emparés d'Haïti de façon éhontée, sans consulter l'ONU ni l'OEA (Organisation des Etats américains)», a-t-il ajouté.

Le président bolivien, Evo Morales, s'est joint mercredi aux critiques et assuré vouloir demander à l'ONU une «réunion d'urgence pour rejeter» la présence américaine qu'il a qualifiée d'«occupation militaire» dans une déclaration.

«Il n'est pas possible que les Etats-Unis utilisent une catastrophe naturelle pour envahir et occuper militairement Haïti», a-t-il ajouté.

Le président du Nicaragua, Daniel Ortega, et M. Chavez, avaient déjà dénoncé ce week-end une «occupation» d'Haïti par les Etats-Unis. Le vice-président bolivien Alvaro Garcia s'était dit mardi «préoccupé» par l'intervention américaine.

Les Etats-Unis ont prévu d'envoyer 4.000 soldats supplémentaires en Haïti, pour porter à 15 000 leurs effectifs participant aux opérations de secours.

Le séisme a fait 75 000 morts, 250 000 blessés et 1 million de sans-abri, d'après un bilan de la Protection civile haïtienne.

«Objectivement aucun autre Etat ne peut assumer un tel défi à part les Etats-Unis (...) les dimensions (de la catastrophe) surpassent les capacités d'un mandat d'un autre pays et même de l'ONU», avait dit à l'AFP Raul Bernal Meza, professeur à l'Université nationale du Centre en Argentine, commentant ces critiques.

«En Amérique latine, nous avons une énorme sensibilité à tout risque d'interventionnisme américain, ce ne serait pas la première fois que les Etats-Unis interviennent en profitant d'une situation dramatique, mais à Haïti ce n'est pas le cas, vu l'étendue des dégâts», selon Gerardo Caetano, de l'Université de la République en Uruguay.

Haïti a été le théâtre de plusieurs interventions militaires américaines en près d'un siècle, notamment sous les ex-présidents Bill Clinton et George W. Bush, aujourd'hui chargés de rassembler des fonds pour les victimes du séisme.

Les Américains ont occupé Haïti de 1915 à 1934.