Tôt hier matin, les sinistrés qui s'entassent sur la place du Champ-de-Mars ont vu des hélicoptères se poser à côté des ruines du Palais national, à Port-au-Prince. Une centaine de militaires américains armés de mitrailleuses ont alors surgi de toutes parts pour sécuriser ce qui reste du symbole de l'État haïtien.

Un groupe de soldats est parti à pied en direction de l'Hôpital général, qui déborde de blessés. Rapidement, ils se sont postés devant la porte d'entrée et ont fait sortir les gens qui n'avaient pas de raison d'être là. «Nous sommes là pour assurer la sécurité de l'hôpital. Nous travaillons avec le gouvernement d'Haïti. Nous sommes ici en mission humanitaire», a dit à l'Agence France-Presse le sergent Bill Smith.

 

Une semaine jour pour jour après le puissant séisme qui a ravagé Haïti, l'hôpital a enfin obtenu du renfort. «Il y a eu pas mal de vols, des malades se sont fait dérober leur téléphone portable, leur sac à main. On n'arrive pas à contrôler tout le monde. C'est pourquoi on a fait appel à eux», a expliqué le chef de la sécurité de l'établissement, Limar Angrand.

Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a tenu à préciser que les forces américaines ne sont pas là pour remplacer la police haïtienne, décimée depuis le séisme. Il a toutefois affirmé que les soldats ont «le droit de défendre les Haïtiens innocents et les membres de la communauté internationale» au besoin.

Des milliers d'autres militaires arriveront sous peu en Haïti pour sécuriser le pays. Hier matin, le Conseil de sécurité des Nations unies a approuvé la demande de renfort faite par le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. Près de 2000 soldats et 1500 policiers s'ajouteront donc sous peu aux forces de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti, la MINUSTAH. Au total, l'ONU aura 8940 militaires et 3711 policiers sur le terrain.

Des soldats canadiens sont également arrivés à Haïti par la voie maritime, hier matin. Le NCSM Athabaskan a pris la direction de Léogâne, à l'est de Port-au-Prince, alors que le NCSM Halifax a accosté à Jacmel, au sud-est de la capitale.

«La région Jacmel-Léogâne a été désignée par le gouvernement d'Haïti comme une priorité pour l'aide internationale, a indiqué en conférence de presse le ministre de la Défense, Peter MacKay. Léogâne se trouve à proximité de l'épicentre du séisme et 90% de ses infrastructures ont été démolies. Jacmel a tout simplement été coupé du monde (ce dont La Presse a fait état hier matin).»

En plus de porter assistance aux survivants du séisme, les soldats tenteront de réparer la route - pour l'instant impraticable - qui relie Jacmel à Port-au-Prince.

Un contingent de militaires a aussi quitté la base de Valcartier et un autre départ est prévu aujourd'hui. Au total, près de 2000 soldats canadiens seront déployés en Haïti.

Une semaine de chaos

Une semaine après le puissant séisme qui a dévasté Haïti, les chances de retrouver des survivants s'amenuisent, mais l'ONU croit qu'il en reste, a souligné hier la porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires, Elizabeth Byrs.

Les promesses de dons pour aider Haïti totalisent plus de 1,2 milliard de dollars, selon l'ONU. Le peuple américain a donné à lui seul 189,9 millions, une somme équivalente à celles récoltées après le tsunami en 2004.

Sur le terrain, la distribution de vivres se poursuit avec d'importantes contraintes logistiques. Beaucoup d'Haïtiens n'ont rien à manger ou à boire. Ils se jettent sur les camions qui leur distribuent des vivres. Avant-hier, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a dû interrompre la distribution d'aide non alimentaire dans le quartier de Delmas parce que les tensions étaient trop vives.

Les survivants du séisme sont à bout et désespérés. «Ces tensions sont compréhensibles étant donné la situation extrêmement difficile dans laquelle se retrouvent les gens qui ont tout perdu», a rapporté le chef des opérations Riccardo Conti, qui est à Port-au-Prince.

«Nous sommes impressionnés de voir comment les Haïtiens, en l'absence du gouvernement, sont calmes et pacifiques», a toutefois indiqué hier en conférence de presse téléphonique David Morley, le PDG de Save the Children Canada.

Les soldats appelés en renfort pourront assister les ONG, qui travaillent dans des conditions difficiles. «La coordination est cruciale. Nous ne pouvons pas juste jeter de la nourriture et de l'eau des camions. Il faut que la distribution soit organisée pour que l'aide se rende aux plus vulnérables», explique Kevin McCort, le PDG de CARE Canada.