La laborieuse période de reconstruction à laquelle Haïti va devoir faire face pourrait être l'occasion d'en finir avec les problèmes d'infrastructures qui ont toujours gangrené Port-au-Prince.

«Il faut que l'aide arrive le plus rapidement possible mais il faut aussi commencer à penser à la manière de mieux reconstruire», déclare Jordan Ryan, directeur du service de Prévention des crises et relèvement du Programme des Nations unies pour le développement. «Il faut essayer de voir le côté positif de ce terrible désastre : il y a une occasion d'aider les gens à mieux rebâtir leurs vies», dit-il dans une interview téléphonique.

Selon l'ONU, le tremblement de terre de magnitude 7 qui a frappé mardi le pays le plus pauvre des Amériques a détruit 10% des habitations de Port-au-Prince, mettant à la rue au moins 300 000 personnes.

Au total, 30% des bâtiments de la capitale haïtienne seraient dévastés ou gravement endommagés, selon l'agence de Stratégie internationale de prévention des catastrophes naturelles.

L'État francophone étant notoirement connu pour sa corruption, la clé d'une reconstruction réussie réside dans une coordination optimale de l'aide et dans l'implication directe des Haïtiens dans la reconstruction, souligne M. Ryan.

«Distribuer un maximum d'argent aux gens dans le besoin et désespérés va les aider à se sentir mieux. Cela va aider à la stabilisation et (au maintien) de la loi et de l'ordre», poursuit-il.

«On pourrait ainsi transformer un désastre en une occasion d'offrir une meilleure vie à la population», croit-il.

En plus des milliers d'habitations et des bidonville effondrés, le séisme a détruit nombre de bâtiments officiels, dont le palais présidentiel et la prison centrale, des hôpitaux, des écoles, ainsi que les grues et une partie des quais du port.

«Il est trop tôt pour dresser un portrait global de l'ampleur des dommages économiques», relève Yvonne Tsikata, chef de la Banque mondiale pour les pays de la zone des Caraïbes.

«Nombre des familles les plus riches d'Haïti ont vu leurs maisons et leurs commerces détruits. Nombre des infrastructures économiques ont été endommagées», a dit vendredi sur CNN l'ancien président américain Bill Clinton, qui, à l'invitation du président Barack Obama, dirige la collecte américaine de fonds, avec son successeur, George W. Bush.

«J'ai demandé à nos fonctionnaires d'aider le gouvernement haïtien à mettre à jour son plan de développement économique en conséquence», a dit M. Clinton, envoyé spécial de l'ONU pour Haïti.

L'ancien hôte de la Maison-Blanche avait critiqué jeudi la bousculade des initiatives humanitaire, relevant que beaucoup se chevauchaient.

L'ONU a déjà reçu des promesses de dons de près de 268,5 millions de dollars d'une vingtaine de pays, institutions et entreprises.

Aucune aide ne sera superflue, souligne Mike Delany, directeur des opérations humanitaires de l'ONG Oxfam, car «on a un double retard de développement : d'un côté, un État faible avec peu de ressources et de l'autre, le plus haut niveau de pauvreté du continent».

Il souligne toutefois que la réussite des projets humanitaires entrepris après le tsunami de décembre 2004 en Asie montre que des catastrophes majeures peuvent permettre d'accroitre le développement de communautés dans le besoin.

«Une bonne implication au niveau local (...) peut aider à établir une plus solide démocratie en Haïti», dit-il à l'AFP, ajoutant toutefois que «ça prendra du temps.»