Des centaines d'élèves des écoles secondaires de Montréal étaient sous le choc, hier, alors que plusieurs restaient sans nouvelles des membres de leur famille restés à Haïti.

Rencontrée aux abords de la polyvalente Calixa-Lavallée à Montréal-Nord, Nathalie, élève de quatrième secondaire, pensait à sa mère, qui vit toujours à Haïti. «Elle est à Port-au-Prince. On n'a pas de nouvelles, a dit la jeune fille, qui retenait péniblement ses larmes. On essaie d'appeler. On essaie. Mais on n'a pas la communication.»

 

Parmi les élèves nés à l'étranger qui fréquentent les écoles de la CSDM, 2922 sont nés en Haïti. Et, comme Nathalie, plusieurs autres y ont toujours de la famille. «Un très grand nombre de jeunes sont ici avec un de leurs parents, le plus souvent leur mère. Leur autre parent est en Haïti», confirme Martin Bibeau, qui enseigne le français depuis 12 ans à l'école secondaire Joseph-François-Perreault, dans le quartier Saint-Michel.

Hier, M. Bibeau a abordé plusieurs élèves d'origine haïtienne pour connaître leur état d'esprit. «La quasi-totalité d'entre eux sont sans nouvelles de leurs proches, note-t-il. Ils gardent espoir. Ils ne peuvent pas s'imaginer le pire.»

L'enseignant affirme que l'ambiance n'était pas trop lourde. «Quelques enfants pleuraient. Mais quand j'ai discuté du séisme avec mes élèves, la plupart semblaient calmes. C'est un peu moins pire que ce à quoi je m'attendais.»

Hier midi, non loin de l'école secondaire Henri-Bourassa, à Montréal-Nord, Suz, Vanessa et Evelande revenaient du casse-croûte, un cornet de frites à la main. Elle discutaient doucement quand La Presse les a abordées.

Toutes ont encore de la famille en Haïti. «Ma mère est là. On essaie de la joindre, mais on n'est pas capable, a résumé Suz. On attend.» «Les gens pleurent dans l'école. Des intervenants sont là pour nous aider. Mais nous sommes inquiètes. On ne sait vraiment pas ce qui se passe là-bas. Ma mère est là, mais je ne sais pas comment elle va», a dit Evelande. Incapable de parler, Vanessa est partie en pleurant.

Au moins 40% des élèves de l'école Henri-Bourassa sont d'origine haïtienne, de même qu'une forte proportion de membres du personnel. Le directeur de l'établissement, Jean-François Bouchard, a tenu à réconforter ses troupes, hier. «On a fait un message d'appui à l'interphone, raconte-t-il. Notre comité de crise est aussi déjà actif.»

Selon M. Bouchard, les élèves étaient inquiets hier, mais plutôt calmes. «Il faudra voir demain (aujourd'hui), prévoit-il. Des chiffres commencent à sortir. Les réactions seront sûrement plus vives à mesure que les nouvelles vont entrer.»

Le quartier de Montréal-Nord est «habitué aux situations de crise», affirme M. Bouchard, qui cite l'exemple de la jeune fille de l'école Lester-B. Pearson qui avait été tabassée par quatre adolescentes de l'école Henri-Bourassa et le cas de Fredy Villanueva, tué par des policiers.

Après neuf ans à la tête de son école, M. Bouchard est maintenant rompu à la gestion de crise. «On est prêt à encadrer tout notre monde de façon adéquate», assure-t-il.

Le porte-parole de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), Alain Perron, assure que des équipes de spécialistes en choc post-traumatique sont prêtes et qu'elles se rendront dès aujourd'hui dans les écoles. «Nos enseignants auront aussi des discussions en classe avec les élèves», explique M. Perron.