Le Chili, qui reçoit vendredi le chef de l'ONU Ban Ki-moon, a décrété trois jours de deuil national à partir de dimanche, après le séisme et le tsunami du 27 février qui ont fait plus de 800 morts, un bilan officiel sur lequel le gouvernement a fait naître une confusion.

«La présidente de la République a décrété un deuil national pour trois jours à partir du dimanche 7 mars minuit, en mémoire des Chiliens et Chiliennes tuées», a déclaré le vice-ministre Patricio Rosende, lisant un communiqué à la presse jeudi soir.

La population a été invitée à mettre un drapeau national aux porches.

Le vice-ministre a ensuite égrené, un à un, une «liste complète des 279 Chiliens qui ont été pleinement identifiés par les services responsables», une liste à la disposition du public sur le site internet du ministère.

A aucun moment Rosende n'a mentionné une révision à la baisse du bilan officiel de 802 morts, datant de mercredi soir.

Il n'a pas non plus donné de nombre de morts non identifiés, comme il le faisait chaque depuis la catastrophe de samedi.

Il n'a pas davantage fait état d'un nombre de disparus.

Dans l'après-midi, la présidente Michelle Bachelet avait suggéré que dans un secteur de la région du Maule, des personnes disparues auraient été signalées comme mortes.

Dans les zones du centre-sud sinistré, des secouristes, des plongeurs, des chiens de secours, poursuivaient la recherche de nombreux disparus, le plus souvent entourés d'une odeur de cadavre de plus en plus prégnante.

Mais dans des quartiers de Concepcion, la deuxième ville du pays avec 500 000 habitants et capitale de la région la plus touchée, les pelleteuses mécaniques se sont mises en action pour déblayer les décombres.

La catastrophe «nous a mis à l'épreuve en tant que nation, une fois de plus», a déclaré Mme Bachelet en visitant Concepcion. «Le Chili va se redresser».

«Ce qui nous est arrivé était horrible, d'ampleur colossale», a-t-elle déclaré, saluant les exemples «de solidarité et d'héroïsme» des secouristes, des forces de sécurité, ou dans la population. Mais aussi les «facettes d'ombre» de la société chilienne, dans les scènes de pillages des 48 heures suivant le séisme.

«Avec la police et les forces armées, nous avons réussi à rétablir l'ordre public», a affirmé la présidente, qui avait annoncé mardi le déploiement de 14 000 militaires. Ils continuaient de superviser un flux d'aide de plus en plus régulier, avec 9 000 tonnes distribuées à la date de jeudi.

«Ne perdez pas de temps, s'il vous plaît, allez vite à Santa Clara !» lança de loin une femme, invitant Mme Bachelet à se rendre à un village côtier, dévasté par trois vagues géantes qui sont suivi samedi le tremblement de terre de magnitude 8,8, l'un des plus violents depuis un siècle.

Sur le littoral, chaque journée de nouveaux cadavres sont découverts par les secouristes qui poursuivent, sans grand espoir, les recherches dans les ruines de maison avalées par le tsunami. La seule ville de Constitucion (60 000 habitants) comptait 86 morts jeudi, et des centaines de disparus.

Chaque jour apportait aussi une histoire de drame, ou d'héroïsme, pendant la catastrophe.

A Constitucion, le directeur de la prison a ainsi pris sur lui de libérer ses 103 détenus pour leur éviter une mort certaine, à l'approche du tsunami.

«Le tremblement de terre venait juste de frapper et les avait vraiment secoués, ils grimpaient littéralement aux murs», a expliqué à l'AFP le directeur, Enrique Fritz.

«Nous sommes très proches de la mer et je ne pouvais pas les laisser mourir enfermés. Alors on a ouvert les cellules et on les a laissés partir».

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon était attendu vendredi en début d'après-midi, pour une visite de deux jours au cours de laquelle il doit se déplacer à Concepcion et dans le port de Talcahuano, dévasté par le tsunami qui a tué davantage que le séisme.

Toujours secoué par les répliques sismiques, le Chili a commencé à calculer les coûts de la catastrophe. Pour la présidente Bachelet, la reconstruction du pays devrait prendre au moins «trois ou quatre ans», soit la quasi-totalité du mandat de son successeur Sebastian Pinera, qui sera investi dans six jours.

«Nous ne serons pas le gouvernement du tremblement de terre, mais celui de la reconstruction», a promis M. Pinera.

Pour le Fonds monétaire international (FMI) le séisme ne devrait cependant pas avoir d'effet majeur sur la croissance du PIB «du fait de la force de l'économie» chilienne.

Plusieurs économistes chiliens ont estimé que la croissance pourrait être freinée à 1% sur le premier semestre 2010, au lieu des 4% escomptés. Mais dès la fin 2010, en 2011 et au-delà, la phase de reconstruction devrait doper l'investissement, et faire rebondir la croissance.