Des pelleteuses ont commencé jeudi à déblayer les décombres après le séisme et le tsunami qui ont fait 800 morts dans le centre-sud du Chili, dont la reconstruction devrait prendre au moins trois ans et endetter le pays, selon le gouvernement.

Des secouristes poursuivaient leurs recherches mais leurs chances de retrouver des survivants s'amenuisaient, cédant la place dans des quartiers de Concepcion, la deuxième ville du pays, à des pelles mécaniques censées faire disparaître l'enchevêtrement de câbles, murs et toits effondrés.

Sur la côte, des plongeurs inspectaient les vagues malgré l'odeur de décomposition qui obligeait les habitants à porter des masques.

«La plupart des corps sont terriblement gonflés et mutilés, très difficiles à identifier», a expliqué le lieutenant Gutierrez à Constitucion. La liste des morts égrène 78 noms dans cette station balnéaire ravagée par le tsunami qui a suivi le séisme de magnitude 8,8, un des plus violents des cent dernières années.

«On pourrait passer de 600 morts dans la région (côtière du Maule) à un millier», a estimé le général Bosco Pesse, commandant militaire de la zone.

Acheminée par 14 000 militaires, l'aide continuait d'arriver dans les zones sinistrées lentement mais plus efficacement qu'au cours des jours précédents, ponctués de violents pillages, alimentés par les pénuries.

Le gouvernement de Michelle Bachelet dit avoir envoyé environ 9.000 tonnes de vivres, eau, couches pour bébés, vêtements, distribuées par des volontaires, encadrés par les soldats que les Chiliens n'avaient pas vu si nombreux dans les rues depuis la dictature militaire (1973-1990).

Selon la présidente, la reconstruction du pays devrait prendre au moins «trois ou quatre ans», marquant ainsi la quasi-totalité du mandat de son successeur Sebastian Pinera, qui prendra la tête de l'État dans sept jours.

Le Chili, considéré comme un modèle de stabilité politique et économique en Amérique latine depuis les années 1990, devra s'endetter pour financer les travaux de reconstruction, auprès de «la Banque mondiale et autres institutions», a précisé Mme Bachelet.

Le coût des dégâts atteindrait 15 à 30 milliards de dollars, selon la société américaine EQECAT, spécialisée dans la modélisation du risque. Environ 10% du Produit intérieur brut (PIB) annuel du pays partirait en fumée.

Pour l'instant, venir en aide aux sinistrés reste la priorité. Plus d'un million d'habitants de huit agglomérations ont passé une nouvelle nuit sous couvre-feu, la quatrième pour Concepcion, où des milliers de sans-abris ont encore dormi dehors.

Craignant des pillages, des habitants dont le logement est resté sur pied ont continué à monter la garde devant chez eux, et allumé des feux qui faisaient planer une odeur de brûlé sur la ville, a constaté l'AFP.

Des secouristes équipés de chiens se sont donnés 24 heures pour retrouver six personnes qui resteraient prisonnières d'un immeuble effondré.

La répartition de l'aide se faisait maison par maison, dans le calme.

Sur la côte, la terre n'a pas laissé de répit aux habitants.

Deux répliques de magnitude 5,9 et 6 suivies d'une alerte au tsunami ont semé la panique. À Constitucion, les habitants se sont mis à courir pour trouver refuge sur les hauteurs, a constaté l'AFP. L'alerte a été levée moins d'une demi-heure après. «Même les soldats avaient peur», a raconté Nelson Muna.

La découverte de l'ampleur de la catastrophe sur la côte a fait enfler la polémique sur «l'erreur de diagnostic» des autorités militaires sur le tsunami.

La Marine a reconnu avoir transmis une information «fort peu claire» à la présidence «pour dire s'il fallait maintenir ou annuler» l'alerte.