Face à la menace du terrorisme nucléaire, brandie par Washington, l'ex-bloc soviétique et le Pakistan figurent en tête de liste des pays «à risque» où du matériel fissile pourrait tomber entre de mauvaises mains, selon les experts.

Les dizaines de réacteurs de recherche civile éparpillés dans le monde pourraient également offrir une cible de choix aux extrémistes cherchant à se procurer de l'uranium enrichi ou du plutonium, les deux ingrédients possibles d'une bombe A.

Alors que le président des États-Unis Barack Obama a appelé mardi près de 50 États à agir contre le risque de terrorisme nucléaire, lors d'un sommet à Washington, les regards se tournaient en premier lieu vers la puissance nucléaire pakistanaise.

Bien qu'Islamabad assure être une «puissance nucléaire responsable» et avoir lourdement protégé ses sites nucléaires sensibles, les gouvernements craignent que des militants islamistes puissent un jour s'emparer d'armes atomiques avec l'aide des services secrets nationaux, soupçonnés de complicité avec les extrémistes pakistanais.

Si la taille de l'arsenal nucléaire pakistanais est sans commune mesure avec celle de la Russie ou d'autres puissances nucléaires, la montée en puissance des extrémistes dans ce pays musulman et les tensions avec l'Inde voisine, également dotée de la bombe atomique, sont autant de facteurs de risque.

«C'est un bien plus petit programme (que celui de la Russie) mais nous savons que certaines franges du gouvernement ont de la sympathie pour Al-Qaeda», estime Daniel Byman, directeur du Centre d'études sur la paix et la sécurité à l'université de Georgetown.

Pour Bruce Riedel, ancien responsable de la CIA, la plus grave menace provient surtout des extrémistes anti-indiens de Lashkar-e-Taiba, auteurs présumés des attentats de Bombay de 2008 qui ont fait 166 morts, et soupçonnés d'être soutenus par le renseignement pakistanais.

Outre le Pakistan, les experts s'accordent à désigner la Russie et les anciennes républiques soviétiques comme les autres «points chauds» en matière de sûreté nucléaire.

Les autorités ont réalisé d'importants efforts pour améliorer la sécurité des sites nucléaires disséminés dans l'ex-URSS, après la chute de l'empire soviétique.

Mais cette multitude de bunkers, de laboratoires et de réacteurs restent insuffisamment sécurisés et il demeure difficile de dresser un inventaire précis du matériel nucléaire qu'ils contiennent, déplorent les experts.

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a recensé une quinzaine de cas de trafic d'uranium enrichi ou de plutonium entre 1993 et 2008, en particulier dans l'ex-bloc soviétique.

En décembre 1998, les autorités russes ont affirmé avoir déjoué une tentative de détournement de 18,5 kg de matériaux radioactifs par des employés d'une installation nucléaire.

En janvier 2007, la Géorgie a annoncé avoir démasqué un trafiquant russe qui cherchait à vendre 100 grammes d'uranium enrichi à un policier se faisant passer pour un membre d'une organisation islamique radicale.

Les gouvernements ont plus récemment réalisé l'existence d'une autre menace sur le front nucléaire, émanant cette fois des centres de recherche nucléaire et d'autres installations civiles recelant des matériaux fissiles.

Selon un rapport de l'université Harvard publié lundi, 60 tonnes d'uranium enrichi sont actuellement utilisés à des fins civiles ou stockés, essentiellement au sein de réacteurs de recherche, dont la moitié hors des États-Unis et de Russie.

Or, écrit ce rapport, «la plupart de ces réacteurs civils sont faiblement sécurisés même quand ils contiennent suffisamment d'uranium enrichi pour fabriquer une bombe».