David Cameron a dû se justifier pied à pied mercredi devant le Parlement sur ses liens avec le groupe de Rupert Murdoch, contraint d'admettre qu'il n'aurait pas dû choisir comme collaborateur Andy Coulson, un ex-dirigeant du News of the World, au coeur du scandale des écoutes.

Pendant plusieurs heures, le premier ministre britannique a fait face à un feu roulant de questions des députés. L'opposition l'a notamment harcelé sur le fait qu'il ait eu un temps comme directeur de la communication un ancien rédacteur en chef du News of the World (NotW), le tabloïd du groupe Murdoch soupçonné d'avoir pratiqué des écoutes à grande échelle dans les années 2000.

Andy Coulson a été récemment arrêté pour son rôle présumé dans les écoutes, puis remis en liberté conditionnelle. Il avait dû démissionner en janvier de son poste à Downing Street à cause du scandale.

«Avec le recul et au vu de ce qui s'est passé ensuite, je ne l'aurais pas recruté», a reconnu le chef du gouvernement. «Mais vous ne prenez pas de décisions avec du recul, vous les prenez sur le moment», a-t-il lancé aux députés.

«Je suis absolument désolé du tollé» que cette nomination a provoqué, a poursuivi le premier ministre, très chahuté par l'opposition, au point que le président de séance a dû intervenir à plusieurs reprises pour faire cesser les huées.

«Le premier ministre a fait le mauvais choix en choisissant de continuer à travailler avec M. Coulson», a lancé le chef de l'opposition Ed Miliband, dénonçant un «tragique conflit d'intérêt».

Mettant en avant «la présomption d'innocence», M. Cameron a promis de «plates excuses» s'il s'avérait que les assurances que lui avait données Andy Coulson qu'il n'était pas impliqué dans cette affaire s'avéraient fausses.

Les députés lui ont aussi demandé des explications sur ses liens avec News Corp., dont David Cameron a rencontré 26 fois les dirigeants en quinze mois et qui avait soutenu sa campagne électorale.

Mardi, lors de son audition par le Parlement, Rupert Murdoch, le magnat des médias, s'était d'ailleurs montré fort loquace sur ses relations privilégiées avec les locataires de Downing Street, racontant leur avoir souvent rendu visite «en passant par la porte de derrière.»

Renvoyant la balle aux travaillistes, M. Cameron a rétorqué que tous les partis «ont courtisé» les médias, rappelant à Ed Miliband qu'il employait lui-même comme conseiller un ancien journaliste du Times, quotidien de l'empire Murdoch.

Pour tenter de calmer la tempête, le premier ministre, qui avait écourté un voyage en Afrique pour intervenir devant la Chambre obligée de prolonger d'un jour sa session, a présenté dans le détail la commission d'enquête indépendante annoncée début juillet.

Présidée par un juge, celle-ci a pour mission de faire la lumière sur le scandale et se pencher sur l'éthique de la presse, après l'émoi suscité par les pratiques du NotW, soupçonné d'avoir écouté quelque 4000 personnalités dans les années 2000.

Cette commission, qui commencera ses auditions dans les prochaines semaines, travaillera parallèlement à Scotland Yard, accusé d'avoir traîné les pieds dans ses investigations, qualifiées de «catalogue d'échecs» par un rapport parlementaire.

Elle sera composée notamment de militants des droits de l'homme, d'un ancien policier et de journalistes, choisis «pour leur expérience», mais aussi «leur complète indépendance», selon M. Cameron. Elle devrait rendre ses conclusions dans douze mois.