Pendant que le premier ministre britannique David Cameron rentrait précipitamment d'Afrique du Sud, hier, pour répondre demain aux questions du comité d'enquête de la Chambre des communes, le corps d'un ex-reporter de News of the world, Sean Hoare, a été retrouvé sans vie. Un rebondissement dramatique dans un scandale qui n'en finit plus de secouer la politique britannique, alors que s'amène aujourd'hui au comité d'enquête le grand patron de l'empire médiatique au centre de la tourmente, Rupert Murdoch.

Les vagues du scandale des écoutes illégales menées par les journalistes de News Of The World ont frappé de plein fouet l'activité du premier ministre britannique. David Cameron a dû raccourcir son voyage en Afrique et il a repoussé d'une journée le début des vacances des parlementaires afin de pouvoir s'exprimer devant eux demain. Il répondra ainsi aux auditions aujourd'hui du magnat de la presse Rupert Murdoch et de son fils James par le comité d'enquête de la Chambre des communes. Preuve de l'embarras du chef du gouvernement, son porte-parole avait tout d'abord précisé que les parlementaires ne pourraient pas le questionner, avant d'accepter un débat à la suite de la montée de vives critiques dans les rangs de l'opposition.

La démission des deux plus hauts responsables de la police nationale, celle de Paul Stephenson ce week-end et celle de son adjoint John Yates hier, a pénalisé encore un peu plus le chef du gouvernement. Comme l'a résumé le leader travailliste Ed Miliband, «il est très inquiétant que le responsable de la police nationale n'ait pas pu discuter avec le premier ministre de questions vitales, car il sentait que David Cameron était lui-même compromis sur cette question à cause d'Andrew Coulson». Celui-ci, démissionnaire de la direction de la rédaction de News Of The World en 2007, avait été nommé dans la foulée conseiller en communication du Parti conservateur et de son leader, David Cameron.

Le premier ministre ne peut plus s'en cacher: le scandale des écoutes illégales du groupe News International est en train de faire vaciller son navire. L'an dernier, sa proximité avec la famille Murdoch a sans doute facilité son élection grâce au soutien sans faille que la famille lui a accordé à travers ses journaux, dont les ventes quotidiennes dépassaient les 3 millions jusqu'à la fermeture de l'hebdomadaire, la semaine dernière. Aujourd'hui, les photos et témoignages de ses dîners, de ses rencontres et même de ses escapades à cheval avec l'ancienne directrice du groupe de médias britanniques Rebekah Brooks, incarcérée dimanche, et de James Murdoch, président du groupe, mettent en cause son indépendance.

Cette relation n'est pourtant pas nouvelle. Conscient de l'influence au Royaume-Uni des médias du groupe News International, David Cameron, qui n'était alors que leader de l'opposition et à propos de qui Rupert Murdoch avait dit en 2006 ne pas penser «grand-chose», se rapproche de celui qui est perçu comme le grand manitou de la politique nationale. Après une série de rencontres et de dîners entre les deux hommes, au contenu gardé secret, The Sun annonce à l'automne 2009 soutenir le Parti conservateur pour la première fois depuis 1997. Avec le résultat que l'on sait.

Son choix de nommer à ses côtés Andrew Coulson, homme suspecté de malversations et sur lequel planait la possibilité d'une enquête judiciaire, remet également en question le jugement du premier ministre. Même s'il a répété au Parlement que «la décision de l'embaucher était [sienne] et seulement la [sienne]» et qu'il en acceptait toute la responsabilité, les Britanniques ne l'ont pas vraiment absout et l'arrestation d'Andrew Coulson a fini de semer le doute. Sa légitimité, gagnée au fil des mois avec une politique sociale et économique extrême mais qui satisfait une partie de son électorat, semble désormais émiettée. Avec elle, sa capacité d'action future se retrouve placée entre guillemets.

Un des dénonciateurs dans le scandale de l'affaire des écoutes téléphoniques mettant en cause le groupe Murdoch, l'ancien reporter de News of the World Sean Hoare, a été retrouvé mort à son domicile hier, mais la police a annoncé que les circonstances de sa mort n'avaient jusqu'ici aucun caractère suspect. M. Hoare avait déclaré dans des entrevues accordées l'an dernier au New York Times et à la BBC que l'ancien rédacteur en chef du tabloïd Andy Coulson, devenu par la suite directeur des communications du premier ministre britannique David Cameron, était au courant de la pratique des écoutes téléphoniques par son journal. La police du Hertfordshire a annoncé dans un communiqué que Sean Hoare a été trouvé mort hier matin à son domicile de Watford, dans le nord de Londres. Selon le Guardian, Sean Hoare souffrait depuis longtemps de problèmes d'alcoolisme et de dépendance à la drogue. AFP