Les dirigeants européens se sont félicités du non écossais à l'indépendance, jugé rassurant pour la cohésion de l'UE à l'heure d'affronter les nouveaux casse-tête de l'hypothèse d'un «Brexit» --la sortie du Royaume-Uni de l'UE-- et de la perspective d'un référendum en Catalogne.

Le résultat du référendum écossais «est bon pour l'Europe unie, ouverte et plus forte que soutient la Commission européenne», a réagi vendredi son président, José Manuel Barroso.

«J'avoue: le résultat me soulage», avait auparavant lâché le président du Parlement européen, Martin Schulz, dans un entretien à la radio allemande Deutschlandfunk.

Les dirigeants européens avaient prévenu qu'en cas d'indépendance, l'Écosse serait considérée comme un pays extérieur à l'Union européenne et devrait donc passer par une procédure d'adhésion, un précédent à haut risque.

Mais l'étape écossaise désormais franchie, la préoccupation est celle des désirs d'indépendance, cette fois britanniques et vis-à-vis de l'UE.

«Royaume-Uni dans une Europe unie»

Saluant la décision des Écossais, le président de l'Union européenne, Herman Van Rompuy, en a ainsi immédiatement tiré la conclusion que «le Royaume-Uni est et restera un membre important de l'Union européenne, pour le bien de tous les citoyens et des États membres».

«La prochaine fois que je rencontrerai David Cameron, je lui dirai que je trouve que c'est bien d'avoir un Royaume-Uni dans une Europe unie», a pour sa part lancé M. Schulz.

«Nous souhaitons une Grande-Bretagne forte en Europe», a également souligné le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert.

«Lorsqu'on va vers l'union et non vers la séparation, j'appuie cela», a renchéri la nouvelle Première ministre polonaise, Ewa Kopacz.

«Le vote écossais permet un Royaume-Uni dans une Europe unie», a jugé le futur commissaire européen français, Pierre Moscovici, sur Twitter.

Sous intense pression des eurosceptiques, le premier ministre David Cameron a promis d'organiser d'ici à 2017, s'il est réélu, un référendum sur une sortie de l'UE qui pourrait virer au scénario catastrophe.

Pour Simon Hix, professeur en politiques européennes à la London School of Economics, le non écossais «réduit d'une certaine manière le risque d'un Brexit», un mot valise composé de Britain et exit (sortie, en anglais).

Avec les engagements pris au cours de la campagne d'accorder plus autonomie à l'Écosse, la Grande-Bretagne va avoir fort à faire en interne ces prochaines années et «la promesse de Cameron d'un référendum sera peut-être ajournée», a-t-il estimé pour l'AFP.

L'Espagne «heureuse»

Sans surprise, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, s'est lui affirmé «très heureux» du rejet d'une indépendance de l'Écosse, similaire à ce que l'Espagne refuse à la Catalogne en déniant aux nationalistes le droit d'organiser le référendum qu'ils planifient pour le 9 novembre.

«Nous sommes très heureux que l'Écosse reste avec nous», a déclaré Mariano Rajoy, se félicitant que les électeurs «aient fait le choix entre la ségrégation et l'intégration, entre l'isolement et l'ouverture».

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, avait prévenu en février qu'il serait «très difficile d'obtenir l'accord de tous les autres États membres» à l'adhésion à l'UE d'une Écosse devenue indépendante, l'Espagne pouvant être tentée de la bloquer pour faire un exemple.

Mais le soulagement espagnol «sera de courte durée», prédit Pablo Calderón Martínez, chercheur en études européennes au King's College de Londres. La qualité du débat démocratique ouvert par le référendum écossais «ne peut qu'encourager le mouvement nationaliste catalan», a-t-il estimé.

Le processus vers l'indépendance de la Catalogne «continue» et se voit même «renforcé» par l'épisode écossais, a de fait estimé le président indépendantiste de région, Artur Mas, dans l'attente d'un vote par le Parlement catalan --où les forces favorables à l'indépendance disposent de la majorité absolue-- d'une loi autorisant une consultation le 9 novembre.

Au vu du bras de fer engagé en Espagne, «le risque est celui d'un blocage politique complet», met en garde Jérémy Dodeigne, chercheur en sciences politiques à l'Université catholique de Louvain (UCL).

De quoi, selon lui, redonner des sueurs froides aux dirigeants de l'UE, «pris entre deux courants, avec une intégration européenne construite autour d'une reconnaissance très forte de la diversité et des régions, mais aussi la peur de faire preuve d'ingérence» dans les affaires des États.