Le spectre de la présidentielle de 2000 plane sur les bureaux de vote de Floride, malgré la mise en place d'un nouveau système électoral dans cet Etat qui a donné de justesse une victoire contestée à George W. Bush il y a huit ans.

Dans le système américain, où le président est élu par les grands électeurs désignés par chacun des 50 Etats, la Floride est le quatrième gros lot après la Californie, New York et le Texas: la péninsule rapporte 27 grands électeurs sur les 270 nécessaires pour faire son entrée à la Maison Blanche.

Lors de la présidentielle de novembre 2000, la Floride s'était retrouvée dans le rôle de l'arbitre après dépouillement des voix dans le reste du pays.

Plus d'un mois après le scrutin, la Cour Suprême des Etats-Unis avait attribué la victoire à M. Bush après une série de comptages et de recomptages contestés qui ne lui donnaient en Floride que 500 voix d'avance sur son adversaire démocrate Al Gore.

Sur l'ensemble des États-Unis, M. Bush avait en fait recueilli moins d'électeurs que son rival.

Cette fois, le gouverneur républicain de Floride, Charlie Crist, assure que pareille mésaventure, qui avait provoqué l'incrédulité de la planète, ne se reproduira pas.

Pour la première fois, les électeurs voteront à l'aide d'ordinateurs qui imprimeront leur choix sur un bulletin lu ensuite par un lecteur optique. Les bulletins seront conservés afin d'être éventuellement recomptés en cas de contestation.

Ce système, unifié au niveau de l'Etat, remplace la multitude de systèmes en place en 2000 au niveau des comtés. Des milliers de votes avaient alors été perdus pour cause de bulletins illisibles, machines à voter défectueuses et listes électorales erronées.

Désormais, «la Floride est considérée comme un Etat pilote dans la réforme électorale du fait des problèmes que nous avons vécus», assure Jennifer Krell Davis, responsable des élections en Floride.

Depuis 2000, l'Etat de 18 millions d'habitants a mis en place une base de données unique pour ses listes électorales afin d'éviter les inscriptions multiples. Les bulletins de vote sont également unifiés dans l'ensemble de l'Etat.

«Grâce à notre législation et nos règles uniformes, la Floride a un processus électoral bien mieux organisé et beaucoup plus stable», affirme Mme Krell Davis.

Mais Susan Pynchon, de l'association Florida Fair Election Coalition, estime que les problèmes sont loin d'être réglés en l'absence de dépouillement manuel.

En 2006, le nouveau système était déjà en place pour les élections législatives, mais sans trace papier. Quelque 18.000 votes auraient alors été perdus à Sarasota, les machines les ayant comptabilisés comme des abstentions, sans possibilité de vérification.

Redoutant que ne lui arrive la même déconvenue qu'à Al Gore, Barack Obama a averti qu'il surveillerait de près le décompte des voix en Floride.

«Je ne veux pas dire d'avance qu'il y aura un problème, mais, à toutes fins utiles, je veux m'assurer qu'il y aura des juristes dans tous les bureaux de vote de l'Etat», a déclaré le candidat démocrate lors d'un récent passage en Floride.

Selon Mme Pynchon, de nombreux nouveaux électeurs, en grande partie démocrates, pourraient se voir refuser l'accès au bureau de vote le 4 novembre suite à des retards administratifs.

Selon elle, des problèmes referont surface à coup sûr si la Floride joue comme en 2000 un rôle crucial dans le scrutin. «Il y a beaucoup de coups tordus» dans une campagne électorale, dit-elle.