Pratiquement personne ne connaissait Barack Obama il y a deux ans. Yosi Sergant, consultant en marketing de L.A., a veillé à ce que cela change. Bachelier en arts et culture à UCLA, M. Sergant, 32 ans, a travaillé à mettre en branle la campagne terrain qui a propulsé le candidat à l'avant-scène de l'actualité. C'est notamment grâce à lui si le poster Hope est devenu une image iconique reconnue partout dans le monde. La Presse l'a rencontré.

Q: Vous êtes consultant en marketing. Qu'est-ce qui vous a poussé à vous engager dans la campagne d'Obama?

R: En 2004, je regardais la convention démocrate à la télé quand Barack Obama a fait son discours. Je ne savais pas qui il était mais, pour la première fois de ma vie, je voyais un homme politique prendre les gens pour des adultes. C'était très frappant, très rafraîchissant. Je me suis dit: «Si cet homme se présente un jour comme candidat présidentiel, je vais travailler pour le faire élire.» J'ai commencé à travailler pour lui en 2006.

 

Q: Pratiquement personne ne connaissait Barack Obama en 2006. Quelle a été votre stratégie?

R: Nous étions un petit groupe de six, à Los Angeles. Les responsables de la campagne d'Obama à Chicago nous ont confié la direction artistique. Barack Obama est venu donner plusieurs discours à L.A. et nous l'avons rencontré. À ce moment-là, à peine une personne sur 50 connaissait son nom. Nous avons fait des posters et des macarons avec le visage du candidat, accompagné du mot «Hope». Nous n'avons pas mis son nom. L'idée était de piquer la curiosité. Ça a très bien fonctionné. Surtout chez les adolescents et les jeunes adultes.

Q: Les adolescents et les jeunes adultes sont difficiles à rejoindre, habituellement, non? Surtout quand il est question de politique.

R: Il faut savoir comment s'y prendre. Par exemple, nous avons ciblé des publications et les sites internet comme Vanity Fair, People Magazine, URB.com, etc. Ces médias ne parleront pas du plan d'assurance santé ou de la politique étrangère d'Obama. Mais ils vont parler d'un graffiteur célèbre qui peint des portraits de lui. Ou bien d'un chanteur hip-hop qui fait une chanson sur Barack Obama. L'idée est de leur donner du matériel qui les intéresse. Le reste se fait tout seul.

Q: Le poster Hope, un portrait en rouge et bleu de Barack Obama, est devenu un objet de collection reconnu partout dans le monde. Comment avez-vous réussi ce coup de marketing?

R: J'étais à une fête à Los Angeles quand j'ai rencontré le graffiteur Shepard Fairey. On s'est mis à parler d'Obama, et il m'a dit qu'il serait intéressé à m'envoyer une image qu'il avait faite. Le lendemain, quand j'ai pris mes courriels, j'ai reçu le poster. Dès que je l'ai vu, j'ai su que ça allait être un succès. On a fait un premier tirage qu'on a vendu 50$ l'exemplaire. Le lendemain, les affiches étaient déjà sur eBay. Certaines se sont vendues 6000 ou 7000$. C'était fou! Aujourd'hui, nous avons imprimé 250 000 posters, qui sont partout aux États-Unis et ailleurs.

Q: Quelle est la différence entre la campagne de John Kerry en 2004 et celle d'Obama cette année? Pourquoi les artistes - et les gens comme vous - sont-ils plus engagés?

R: Les artistes réagissent à l'émotion. Ils ne portent pas souvent attention à la politique parce qu'ils ne sentent pas que les politiciens parlent avec leur coeur. John Kerry avait des idées chères aux démocrates, mais son côté détaché et sérieux n'a pas mobilisé les artistes. Obama a tout de suite connecté avec les artistes parce qu'il a une approche très franche, très ouverte. Aussi, Obama a très vite montré qu'il était ouvert aux changements technologiques. Par exemple, sa campagne communique avec les supporters par messages textes. Les jeunes sont extrêmement sensibles à cela. Beaucoup plus qu'on pourrait le croire.

Q: Quelle est la plus grande difficulté dans votre travail?

R: C'est difficile de comprendre les lois. Tout travail bénévole fait pour un candidat est soumis à des règlements complexes. Il y a des barrières, et nous apprenons le fonctionnement du système au fur et à mesure. Ces jours-ci, nous communiquons avec les groupes étudiants dans les collèges et les universités dans les États clés (swing states). Nous nous assurons qu'ils ont tous les posters et tous les autocollants d'Obama qu'ils veulent. L'idée est d'être très présent sur le terrain. C'est cela qui fait la différence.