Le président palestinien Mahmoud Abbas a condamné dimanche le génocide juif, dans une déclaration sans précédent, peu avant le début des commémorations de la Shoah en Israël, et appelé le gouvernement israélien à conclure une paix «juste» avec les Palestiniens.

«Ce qui est arrivé aux juifs durant l'Holocauste est le crime le plus odieux qui soit survenu contre l'humanité pendant l'ère moderne», a estimé M. Abbas, selon un communiqué de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), qu'il dirige, publié le jour où Israël va commencer à commémorer la Shoah.

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Ce n'est pas la première fois que le président palestinien, à qui il a été reproché d'avoir émis des doutes sur l'ampleur du génocide dans son doctorat obtenu à l'Université de Moscou en 1982, dénonce le «crime» de l'Holocauste.

Recevant des journalistes juifs le 1er juillet 2010 à Ramallah (Cisjordanie), il avait rappelé avoir envoyé ses représentants à des cérémonies commémoratives, y compris à Auschwitz. «Comment peut-on nous accuser de nier l'Holocauste?», avait-il lancé.

Mais s'agit de sa condamnation la plus forte à ce jour. Elle a aussi été diffusée en langue arabe.

M. Abbas, qui a également offert sa «sympathie aux familles des victimes et (aux) nombreux autres innocents tués par les nazis», a tenu ces propos lors d'un entretien la semaine dernière avec un rabbin américain, Marc Schneier, avocat du dialogue entre musulmans et juifs.

Interrogé par l'AFP, l'historien israélien Efraim Zuroff, directeur du Centre Simon-Wiesenthal à Jérusalem, a indiqué être «toujours heureux quand quelqu'un qui a nié l'Holocauste dans le passé fait une telle déclaration».

«Mais dans ce cas j'ai l'impression que c'est surtout lié aux problèmes politiques du Moyen-Orient», a-t-il nuancé, en référence au processus de paix israélo-palestinien dans l'impasse.

Yad Vashem, le mémorial de l'Holocauste à Jérusalem, a pour sa part estimé que la déclaration de M. Abbas «pourrait constituer un signal de changement et nous espérons que cela se reflétera dans les sites internet de l'Autorité palestinienne, dans les programmes scolaires et les discours».

Appel à la paix

Dans son communiqué, M. Abbas a exhorté le gouvernement israélien «à saisir l'opportunité de conclure une paix juste et globale dans la région, basée sur une solution à deux États, Israël et la Palestine cohabitant côte à côte dans la paix et la sécurité».

Les pourparlers de paix, relancés en juillet 2013 sous l'égide de Washington, ont été suspendus jeudi par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou à la suite de la signature d'un nouvel accord de réconciliation entre l'OLP et le mouvement islamiste Hamas qui ne reconnaît pas jusqu'à présent Israël et prône la lutte armée.

Aux termes de cet accord, l'OLP et le Hamas, au pouvoir à Gaza, sont convenus de former prochainement un gouvernement de «consensus national» que dirigera le président Abbas et qui sera composé de personnalités indépendantes.

Samedi, devant la direction de l'OLP, M. Abbas a promis que ce futur gouvernement rejetterait la violence et reconnaîtrait l'État d'Israël afin de rassurer la communauté internationale.

«Coup de grâce»

Mais Israël a estimé qu'en renouant une alliance avec le Hamas, qu'il considère comme une «organisation terroriste», le dirigeant palestinien avait donné «le coup de grâce» au processus de paix.

«Le Hamas nie l'Holocauste tout en tentant de créer un autre Holocauste en détruisant l'État d'Israël», a accusé dimanche M. Nétanyahou.

Israël ne négociera pas la paix avec le nouveau gouvernement palestinien tant que le Hamas ne reconnaîtra pas l'État hébreu, a ensuite souligné M. Nétanyahou sur CNN.

«Soit le Hamas renonce à la destruction d'Israël, adopte le chemin de la paix et dénonce la terreur, soit le président Abbas renonce au Hamas», a-t-il dit.

«Si l'un de ces deux événements se produisait, nous pourrions revenir à la table des négociations», a-t-il ajouté.

En Israël, la coalition gouvernementale semble cependant divisée sur l'avenir des négociations, les ministres les plus modérés, comme Tzipi Livni, étant partisans d'«attendre» la composition du nouveau cabinet palestinien avant d'enterrer définitivement la paix.

Le très droitier ministre de l'Économie Naftali Bennett, proche des colons, a en revanche estimé devant des journalistes étrangers qu'il ne serait pas possible de «parvenir à un accord de paix dans un avenir proche». Il a appelé à annexer les zones contrôlées par Israël en Cisjordanie occupée.

La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a pour sa part pressé Israël et les Palestiniens de revenir à la table des négociations en soulignant que les efforts menés par les États-Unis en vue de la paix ne devaient pas «gâchés».

Pas de pourparlers tant que le Hamas ne reconnaît pas Israël

WASHINGTON - Israël ne négociera pas la paix avec le nouveau gouvernement palestinien tant que le Hamas ne déclarera pas reconnaître l'État hébreu, a affirmé dimanche le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Celui-ci a dit dans une interview sur CNN que le mieux pour que des pourparlers de paix reprennent serait que le président palestinien Mahmoud Abbas renonce à l'alliance avec le Hamas, le mouvement islamiste qui appelle à la destruction d'Israël. À défaut, une reconnaissance publique par le Hamas de l'État d'Israël pourrait ramener l'État juif à la table des négociations.

«Soit le Hamas renonce à la destruction d'Israël, adopte le chemin de la paix et dénonce la terreur, soit le président Abbas renonce au Hamas», a déclaré M. Nétanyahou.

«Si l'un de ces deux événements se produisait, nous pourrions revenir à la table des négociations. J'espère qu'il renoncera à son alliance avec le Hamas et qu'il reviendra à la table des négociations, la balle est dans son camp», a ajouté le premier ministre israélien.

Mercredi un accord palestinien de réconciliation signé à Gaza entre l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) et le Hamas islamiste prévoit la formation d'un gouvernement de «consensus national» et la tenue d'élections à la fin de l'année.

Dès l'annonce de cet accord, M. Nétanyahou a suspendu les négociations en vue d'un accord de paix, qui avaient repris l'été dernier à l'initiative du secrétaire d'État américain John Kerry.

Samedi, Mahmoud Abbas a promis que le futur gouvernement d'union nationale palestinien composé de personnalités indépendantes, en accord avec le Hamas, rejetterait la violence, afin de rassurer la communauté internationale sur sa volonté de paix avec Israël.

Autre signe de bonne volonté du président palestinien, celui-ci a condamné dimanche la Shoah, «le crime le plus odieux qui soit survenu contre l'humanité pendant l'ère moderne», sa condamnation la plus forte du génocide juif à ce jour. Il a aussi appelé le gouvernement israélien à conclure une paix «juste» avec les Palestiniens.

Malgré la position ferme de Benjamin Nétanyahou, son cabinet apparaît divisé face à ces derniers développements. Ainsi, la ministre de la Justice Tzipi Livni, principale diplomate responsable des négociations de paix avec les Palestiniens, a estimé qu'il était important d'attendre de voir quel visage le futur gouvernement d'union palestinien allait présenter.