Israël se trouvait hier soir au bord d'une nouvelle invasion de la bande de Gaza - et de nouvelles frustrations.

L'unique État nucléaire du Moyen-Orient a beau déployer sa toute-puissance militaire contre les Palestiniens, il ne peut forcer à la soumission ce peuple de réfugiés, d'assiégés, de dépossédés et de kamikazes armés de kalachnikov, de bombes et de roquettes artisanales, de pierres et de frondes.

L'arme suprême des Palestiniens, c'est la résistance nationale, le courage du désespoir. Plus Israël les frappe, plus se durcit chez eux la volonté de lutter et le sens du martyre.

 

Guerre de 100 ans

Les roquettes Kassam tirées par le Hamas et les frappes aériennes que mène Israël depuis sept jours ne constituent pas un «conflit», encore moins «le conflit» israélo-palestinien.

Ce n'est que la dernière manifestation d'un conflit qui dure depuis 100 ans, et qui s'est intensifié après la création d'Israël en 1948: les Juifs ont eu un pays après la Shoah mais, pour les Palestiniens, c'était la Naqba («Catastrophe»), qui empire chaque jour.

«Le conflit» a pris une tournure plus féroce après la guerre de 1967, quand Israël a occupé l'ensemble de la Palestine sous mandat britannique. L'État hébreu est devenu une «puissance occupante» aux yeux du droit international, ce qui accordait aux Palestiniens «le droit inaliénable de résister».

Si bien que la «guerre des Six Jours» de juin 1967 dure depuis 41 ans et risque de durer aussi longtemps que durera «l'occupation» israélienne.

Que vise cette opération Plomb durci d'Israël contre la bande de Gaza, étroite langue de terre sableuse de 360 km2 sur la Méditerranée bondée de 1,5 million d'habitants, dont la grande majorité sont des réfugiés venus d'Israël en 1948?

Pour Ehoud Olmert, premier ministre sortant, il faut «accroître la sécurité des habitants du sud d'Israël». Pour Tzipi Livni, la ministre des Affaires étrangères, chef du parti Kadima et candidate aux législatives de février, il s'agit d'«affaiblir le Hamas» et de «changer la réalité sur le terrain». Pour le ministre de la Défense, Ehoud Barak, qui mène le Parti travailliste aux élections, c'est une «guerre sans merci» pour «en finir avec le Hamas».

Élections et le Liban

La saison électorale a été décisive dans le choix des armes et du moment: le Hamas n'a pas renouvelé une trêve de six mois en décembre; et les élections israéliennes ont lieu le 10 février; et le Likoud de Benjamin Netanyahu débordait dangereusement la coalition Olmert-Livni-Barak sur sa droite.

Le choix de la guerre vise aussi à «laver» l'humiliation de l'armée israélienne, tenue en échec en 2006 par le Hezbollah au Liban Sud.

Sur le terrain accidenté du Liban, faire la guerre au Hezbollah, c'était comme chasser les aigles dans la montagne. Dans la bande de Gaza, étroite plaine littorale, cibler le Hamas, ce sera comme tirer sur des volailles dans une cage.

Et pourtant. Si Tsahal envahit Gaza, le prix en vies humaines risque d'être très élevé. Et, estime Daniel Levi, ancien conseiller du gouvernement israélien, «si en fin de compte le Hamas peut encore tirer une balle ou une roquette, il clamera victoire».

De Beyrouth, en 1982, à Gaza en 2008-2009, Israël a montré ses muscles, chassé l'OLP du Liban, tué les lieutenants de Yasser Arafat, bombardé ses QG à Ramallah, assassiné le cheikh Yassine, fondateur du Hamas, mais «le conflit» demeure entier.

Pour Israël, puissant occupant, c'est une situation sans issue.