Quelque 200 000 enfants de Gaza ont repris samedi le chemin de l'école après trois semaines de guerre où beaucoup ont perdu leur maison, des parents ou des proches, et restent traumatisés.

L'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, l'Unrwa, a rouvert les 221 établissements scolaires qu'elle administre dans le territoire et dont beaucoup ont servi à abriter des dizaines de milliers de gens pendant l'offensive israélienne contre le Hamas, qui s'est achevée dimanche dernier. À l'école de garçons Al-Zoukour de Beit Lahiya, les enfants se sont retrouvés dans la vaste cour avec leurs sacs trop grands sur le dos, criant et jouant près d'une salle de classe brûlée par un obus israélien.

L'établissement a été touché et incendié il y a une semaine. Deux garçons de cinq et sept ans y ont été tués et une dizaine de gens blessés, dont leur mère, qui a eu les jambes sectionnées, parmi les 1 600 personnes réfugiées là.

L'école est l'une des trois à avoir été visées par des tirs israéliens, le plus meurtrier ayant fait plus de 40 morts non loin de là, le 6 janvier, à Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza.

L'armée israélienne a assuré avoir répliqué à des attaques venues des bâtiments ou de leur proximité immédiate, mais le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit scandalisé et a exigé que les responsables rendent des comptes devant des instances judiciaires.

Christopher Gunness, porte-parole de l'Unrwa, a déclaré à l'AFP que l'agence souhaitait créer un sentiment de retour à la normale en rouvrant les écoles, même si les réparations ne sont pas achevées.

À Al-Zoukour, les séquelles d'un conflit qui a fait plus de 1 300 morts, dont un tiers d'enfants, selon les services médicaux palestiniens, ne sont pas seulement visibles sur les murs.

«Avancez si votre père ou votre mère sont morts en martyrs», déclare le directeur Riad Maliha au mégaphone alors que les enfants se sont mis en rangs.  «Avancez si votre maison a été détruite», ajoute-t-il.

Plus de 20 écoliers font un pas en avant pour s'inscrire auprès de l'ONU et faire en sorte que leur famille puisse bénéficier d'une aide.

Parmi eux, Anas Abbas, un garçon de 12 ans, timide.

«Ils ont détruit notre maison et tué cinq de mes voisins. Les juifs étaient très près de chez nous», dit-il.

Comme les autres enfants, il revient sur son expérience en phrases courtes et répond souvent d'un seul mot, gardant pour lui-même la plupart de ce qu'il a vécu.

Le directeur, M. Maliha, explique que les premiers jours de classe seront consacrés à des séances où les enseignants tenteront d'amener les enfants à s'exprimer.

«Ils les encourageront à parler de ce qui s'est passé, de dessiner ou d'écrire là-dessus, dit-il. Imaginez ce à quoi les conversations vont ressembler. Des dizaines d'enfants traumatisés reprennent l'école aujourd'hui.»

À Khitam Aziz, conseiller psychologique d'Al-Zoukour, les enfants posent des questions sur les traces du conflit: la salle de classe incendiée à l'étage, les trous laissés par les obus dans les murs.

«Ils me demandent pourquoi on a bombardé l'école et disent avoir peur qu'ils (les Israéliens) reviennent. On leur dit que les juifs ne reviendront pas attaquer l'école, qu'ils ne doivent pas avoir peur, qu'ils peuvent jouer», explique-t-il