L'Iran et les États-Unis se retrouvent dimanche en Suisse pour la dernière ligne droite des négociations sur le programme nucléaire controversé de Téhéran, avec l'espoir de sceller un accord politique historique d'ici à la fin mars.

Mohammad Javad Zarif, le chef de diplomatie iranienne et son équipe sont arrivés dimanche matin à Lausanne précédés par les négociateurs américains venant de Washington. Il n'y a eu  aucune déclaration aux journalistes installés devant l'hôtel Beau Rivage, cadre des discussions.

Après 12 ans de tensions internationales et 18 mois de pourparlers intenses, la République islamique et les grandes puissances du groupe 5+1 (États-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni, France, et Allemagne), sous l'égide de l'Union européenne, se sont donné jusqu'au 31 mars pour conclure un règlement garantissant que l'Iran n'aura jamais la bombe atomique, en échange d'une levée des sanctions.

Avant d'arriver dimanche soir à Lausanne, le chef de la diplomatie américaine John Kerry a soufflé le chaud et le froid sur les chances de parvenir à un accord.

«Mon espoir est que dans les prochains jours cela sera possible», a-t-il déclaré, depuis l'Égypte, selon l'extrait d'un entretien à la télévision américaine CBS qui doit être diffusé dimanche.

«S'il (le programme nucléaire iranien, NDLR) est pacifique, allons-y, finissons-en», a lancé le secrétaire d'État.

En cas d'accord politique d'ici deux semaines, le 5+1 et Téhéran sont convenus de finaliser d'ici au 30 juin/1er juillet tous les détails techniques de ce règlement général.

Ce texte de quelques feuillets fixerait les grands chapitres pour garantir le caractère pacifique des activités nucléaires iraniennes. Il établirait aussi le principe du contrôle des installations de Téhéran, la durée de l'accord et le calendrier d'une levée progressive des sanctions qui étouffent l'économie iranienne.

Mais en visite samedi à Charm el-Cheikh, John Kerry, s'est montré également prudent. Lors d'une conférence de presse, il a certes relevé les «progrès» dans les discussions avec l'Iran, mais en prévenant qu'il subsistait des «divergences importantes».

«Nous ne savons toujours pas si nous y parviendrons ou pas», a-t-il mis en garde. «Le temps est compté» pour espérer trouver «un bon accord», a insisté le ministre américain, rappelant que le président Barack Obama avait «dit et redit qu'il ne sera pas permis à l'Iran de posséder une arme nucléaire».

La grande puissance chiite a toujours démenti vouloir se doter de la bombe atomique et a toujours affirmé que son programme nucléaire n'avait que des objectifs civils.

Le président Obama, qui a fait d'un rapprochement avec l'Iran une priorité de sa politique étrangère, n'a jamais totalement exclu de bombarder les infrastructures iraniennes en cas d'échec de la diplomatie. Cette très hypothétique option n'a toutefois pas apaisé la colère d'Israël, allié de Washington et ennemi de l'Iran.

Le département d'État n'a pas dit quand son patron John Kerry quitterait Lausanne. Peut-être vendredi à la veille du Nouvel An iranien, le 21 mars.

Zarif à Bruxelles lundi

Après son premier entretien avec M. Kerry, dès dimanche soir ou lundi matin, M. Zarif est attendu dans la journée à Bruxelles pour voir les chefs des diplomaties européenne, française, britannique et allemande. Les délégations du 5+1 et de l'Iran doivent ensuite se retrouver mardi à Lausanne.

D'après un diplomate européen toutefois, il sera «tout à fait» nécessaire de poursuivre, après le 31 mars, des discussions sur des points techniques en suspens. Un éventuel accord politique prendrait la forme d'un «point d'étape clé sur les points les plus importants», selon ce responsable.

Cette possible solution diplomatique historique sur le nucléaire a également remobilisé ses opposants, tant aux États-Unis qu'en Iran.

À Washington, une tempête politique souffle entre le Congrès républicain et l'administration démocrate.

Le Capitole a invité en grande pompe le 3 mars le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui a défié et mis en rage le président américain en cherchant à torpiller l'accord en préparation.

Le contentieux aux États-Unis se cristallise maintenant sur une lettre que 47 sénateurs républicains ont adressée aux dirigeants iraniens pour contester la légalité et la valeur diplomatique d'un accord international.

John Kerry a une nouvelle fois tonné contre une initiative parlementaire «inconstitutionnelle» qui risque de faire capoter les négociations.

En riposte à l'hostilité d'élus américains, le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, qui a le dernier mot sur les dossiers stratégiques de son pays, avait dénoncé jeudi la «fourberie» de l'Amérique.