Le gouvernement canadien s'est dit «profondément sceptique», dimanche, de l'entente nucléaire conclue samedi entre l'Iran et les États-Unis ainsi que cinq autres puissances mondiales, affirmant que les sanctions imposées par Ottawa demeureraient fermes jusqu'à ce qu'il voie des actions concrètes.

Le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a semblé prendre davantage de distance avec cette entente en disant que le Canada surveillerait l'Iran de près dans les semaines et mois à venir.

«Nous avons nos propres politiques étrangères au Canada. Nous pensons que les actions passées prédisent le mieux les actions futures. Et l'Iran a défié le Conseil de sécurité des Nations Unies et l'Agence internationale de l'énergie atomique. Pour dire les choses simplement, l'Iran n'a pas gagné le droit au bénéfice du doute», a affirmé M. Baird aux journalistes, dimanche.

Cet accord intérimaire conclu à Genève oblige l'Iran à mettre un frein à ses activités nucléaires en échange d'une réduction limitée et graduelle de sanctions à son endroit.

Lors d'une déclaration officielle à la Maison-Blanche, samedi soir, le président Barack Obama a déclaré que cette entente représentait «un important premier pas» et «un nouveau chemin» vers un monde plus sécuritaire. Selon M. Obama, l'accord inclut des «contraintes substantielles» à l'endroit de l'Iran et lui bloque l'accès le plus probable vers la fabrication d'une bombe nucléaire.

Israël, pour sa part, croit que l'entente est une «erreur historique».

À Ottawa, M. Baird a adopté une approche plus mesurée.

«Nous sommes profondément sceptiques sur l'Iran et sa capacité à honorer ses obligations», a-t-il dit, ajoutant que le Canada, qui s'est montré un des plus fermes alliés d'Israël, particulièrement depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs, croit que «toutes les mesures diplomatiques» devraient être prises pour que l'Iran n'obtienne pas d'arme nucléaire.

«Un Iran nucléaire ne serait pas une menace que pour le Canada ou ses alliés, mais aussi pour l'intégrité de décennies d'efforts pour la non-prolifération nucléaire. Cela amènerait les États voisins à lancer leur propre programme nucléaire.»

Le ministre a ajouté que les sanctions canadiennes demeureraient bien en place.

«Des sanctions efficaces ont mené le régime à présenter un front plus modéré et à ouvrir la porte aux négociations, a-t-il affirmé. Le peuple iranien mérite la liberté et la prospérité dont il a été privé à cause des ambitions nucléaires du régime. D'ici là, les sanctions canadiennes resteront fermes et entières.»

Le Nouveau Parti démocratique a également réagi en publiant une déclaration dans laquelle Paul Dewar, porte-parole de l'opposition en matière d'affaires étrangères, considère l'entente intérimaire «comme un premier pas important en vue d'assurer la paix et la sécurité dans cette région du monde». Il appelle aussi les conservateurs à l'endosser.

«Il est maintenant essentiel que le gouvernement canadien travaille avec nos alliés, comme les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, et fasse sa part pour assurer que cet accord intérimaire puisse devenir la solution complète au programme nucléaire de l'Iran», affirme M. Dewar.

L'entente conclue samedi est considérée comme une première étape vers une entente finale qui éradiquerait tout développement d'armes nucléaires en Iran. Elle émane de négociations amorcées lors de la réunion annuelle des Nations unies en septembre dernier, incluant une conversation téléphonique de 15 minutes entre le président américain Barack Obama et le nouveau président iranien, Hassan Rouhani.

Il s'agit d'un jalon marquant entre les deux pays, qui ont rompu leurs relations diplomatiques il y a 34 ans lorsque la révolution islamique qui s'installait alors en Iran a mené à une invasion de l'ambassade des États-Unis à Téhéran.