Le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a mis en garde vendredi contre un accord sur le nucléaire avec l'Iran, son ennemi juré, lors d'un tête à tête tendu avec le secrétaire d'État américain John Kerry à Tel-Aviv.

«Israël n'est pas tenu par cet accord et fera tout le nécessaire pour se défendre et défendre la sécurité de son peuple», a plaidé M. Nétanyahou lors de cette rencontre de deux heures à l'aéroport de Tel-Aviv avant le départ de M. Kerry à Genève pour négocier un compromis.

Répondant aux objections israéliennes, le porte-parole adjoint du président américain Barack Obama, Josh Earnest, a estimé que «toute critique sur l'accord est prématurée».

Interrogé sur la mise en garde de M. Nétanyahou, il a assuré que «les États-Unis et Israël sont complètement d'accord sur la nécessité d'empêcher l'Iran d'obtenir une arme nucléaire».

M. Obama a appelé lui-même vendredi au téléphone Benyamin Nétanyahou afin de «discuter de l'Iran et de nos efforts en cours pour parvenir à une résolution pacifique» dans le dossier nucléaire, selon la présidence américaine.

Le président américain a «insisté sur son engagement à empêcher l'Iran d'obtenir une arme nucléaire» et «mis le Premier ministre au courant de l'avancée des négociations à Genève», a précisé la même source.

À Genève, M. Kerry a annoncé qu'il n'y avait pas encore d'accord sur le dossier nucléaire controversé iranien, en négociation depuis jeudi entre les grandes puissances et la République islamique.

Les discussions entre Téhéran et le groupe des 5+1 (États-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni, France et Allemagne) à Genève sont centrées sur une proposition de l'Iran, où le changement de ton sur le dossier est perceptible depuis la prise de fonction en août du président modéré Hassan Rohani.

Selon cette proposition, non rendue publique, l'Iran accepterait de geler une partie de son programme controversé en échange de la levée de certaines sanctions internationales qui asphyxient son économie.

M. Nétanyahou a réaffirmé que son pays rejetait «complètement» le compromis discuté en Suisse, y voyant «l'affaire du siècle pour l'Iran».

Il a indiqué avoir rappelé à M. Kerry qu'il avait dit que «mieux valait pas d'accord qu'un mauvais accord». «Et l'accord en discussion est un mauvais accord, un très mauvais accord. L'Iran n'est pas obligé de démanteler ne serait-ce qu'une centrifugeuse», a-t-il déploré.

M. Nétanyahou a «conjuré le secrétaire d'État Kerry de ne pas se précipiter pour signer, d'attendre, de réviser sa position, d'obtenir un bon accord».

«Une erreur historique»

M. Zarif, interrogé par CNN, a jugé un accord possible avant vendredi soir, mais a exclu de stopper l'enrichissement d'uranium «dans son ensemble».

L'enrichissement de l'uranium par l'Iran est au coeur des inquiétudes des Occidentaux et d'Israël, qui craignent que l'uranium enrichi à 20% ne soit utilisé pour obtenir de l'uranium à 90%, pour un usage militaire.

Israël, considéré comme la seule puissance atomique de la région, et l'Occident soupçonnent l'Iran de dissimuler un volet militaire derrière son programme civil, ce que Téhéran dément.

Israël voit dans le programme atomique de Téhéran une menace pour son existence, alors que l'Iran ne reconnaît pas son existence.

Le ministre iranien des Affaires étrangères a déclaré vendredi à la radio-télévision publique suisse qu'Israël n'avait «aucune crédibilité» pour demander l'arrêt du programme nucléaire iranien.

Israël «est le seul détenteur d'armes nucléaires dans la région, le seul pays non membre du Traité de non-prolifération (...) et la principale source de menace et d'instabilité dans la région», a affirmé M. Zarif.

Mercredi, M. Nétanyahou avait déjà mis en garde les négociateurs occidentaux contre «une erreur d'ampleur historique», répétant qu'Israël «se réserve toujours le droit de se défendre lui-même, par ses propres moyens, contre toute menace».

M. Nétanyahou a maintes fois évoqué une attaque préventive israélienne contre les sites nucléaires iraniens.

M. Kerry, venu d'Amman spécialement pour voir M. Nétanyahou - sa troisième rencontre avec lui en trois jours - a interrompu sa tournée au Proche-Orient, pour se rendre à Genève.

Cette tournée était notamment consacrée à la crise dans le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, chaque camp s'accusant de saper le dialogue renoué en juillet après trois ans d'interruption.