«5, 4, 3, 2, 1, zéro», la navette américaine Atlantis et les quatre astronautes à son bord sont propulsés vers le ciel dans un grondement de tonnerre: il est 11H29 locales, les spectateurs sentent le sol vibrer sous leurs pieds et un frémissement les parcourir.

«Tout simplement impressionnant, le meilleur spectacle que j'aie jamais vu!»: s'exclame Pete Riesett, un spectateur qui se tient près de l'horloge du compte à rebours, soit à cinq kilomètres à peine du site du lancement de la navette.

Comme lui, et sous un ciel couvert, ils sont un million de passionnés venus autour du Centre Spatial Kennedy, en Floride, pour voir de leurs propres yeux, le dernier lancement d'un orbiteur américain, 30 ans après le début du programme.

Au moment où la navette s'est arrachée du sol dans un nuage de feu et de fumée, Gabrielle Laine, New-yorkaise de 40 ans, a senti un «frémissement la parcourir», le même qu'elle avait éprouvé quand les deux tours du World Trade Center se sont effondrées.

«Regarder le lancement d'Atlantis c'était trop pour moi», explique-t-elle en essuyant ses larmes. Située elle aussi à cinq kilomètres du pas de tir, elle a senti tout son corps trembler quand l'énorme oiseau blanc s'est arraché du sol.

«J'étais au World Trade Center le 11-Septembre et le frémissement qui me traversa alors était très similaire. C'est un peu étrange», confie-t-elle.

Kevin Dang, touriste de 32 ans venu spécialement de Washington, avoue que «le grondement était vraiment très puissant: On sentait le sol trembler, c'était étonnant».

«On ne va pas vieillir quand on a ressenti une telle émotion!»: Beth Beck a assisté à une dizaine de lancements de navette, mais longtemps encore après l'envol historique d'Atlantis, cette cadre de la Nasa a toujours «la chair de poule».

Perplexe cinq minutes encore avant le départ, Maria Rogers, 37 ans, ne pensait pas que cela la toucherait: «Et soudain... quand la navette s'est envolée, j'ai été submergée par l'émotion».

Avant même la fin de la mission, la nostalgie s'est déjà emparée des employés du Centre Kennedy.

Pour Allard Beutel, porte-parole du Centre Spatial Kennedy, «c'est au moment de l'atterrissage que cela fera vraiment mal». En regardant s'envoler pour la dernière fois la machine, il s'est dit encore emballé car «la mission est en cours». Mais au retour, «c'est là qu'on en verra beaucoup avec des larmes aux yeux».

David Garrett, 76 ans, ancien responsable de la communication à la Nasa et aujourd'hui retraité partage cet avis. «Je me sens un peu triste, mais il est vrai que l'atterrissage sera pire car il marquera vraiment la fin de la navette». «Vous savez, la navette a été une grande part de ma vie», insiste le vieil homme.

Moins bouleversé, John Logsdon, professeur retraité de l'Université George Washington et ancien directeur du Space Policy Institute à Washington, voit la fin de la navette comme «un soulagement».

«Un soulagement que le dernier lancement se soit bien passé mais aussi parce que maintenant nous pouvons passer au prochain système de transport spatial». Pour cet expert, «c'est la fin d'une ère et j'espère le début d'une nouvelle» dans l'exploration habitée de l'espace.