Les États-Unis célébraient lundi l'élimination d'Oussama ben Laden par un commando américain près de 10 ans après les attentats du 11 Septembre 2001, mais l'inquiétude restait de mise dans le monde face au risque de représailles.

«Je pense que nous pouvons tous être d'accord pour dire que c'est un grand jour pour l'Amérique», s'est félicité le président Barack Obama lundi en milieu de journée, 12 heures après avoir annoncé au monde l'élimination du chef d'Al-Qaïda.

«Le monde est plus sûr, c'est un endroit meilleur après la mort d'Oussama ben Laden», a-t-il ajouté à propos de l'instigateur des attentats du 11 Septembre, dont les Américains s'apprêtent à marquer le 10e anniversaire.

Barack Obama se rendra jeudi à New York, à Ground Zero, sur le site des tours jumelles détruites, pour rencontrer des familles de victimes du 11 Septembre.

L'annonce de la mort de l'homme le plus recherché au monde a provoqué une vague de joie aux États-Unis, où des milliers de personnes se sont spontanément rassemblées en pleine nuit dans les grandes villes du pays, notamment sur les lieux des attentats du 11 Septembre et devant la Maison-Blanche.

A Dearborn, une ville du Michigan qui abrite l'une des plus grandes communautés musulmanes des États-Unis une foule s'est rassemblée aux cris de «USA! USA!» devant la mairie pour saluer la mort du fugitif.

Le principal conseiller du président Obama pour l'antiterrorisme, John Brennan, a assuré que les Etats-Unis «enterreront» Al-Qaïda comme ils ont éliminé ben Laden.

Ben Laden, né en 1957, a été tué à Abbottabad, ville située à environ 80 kilomètres par la route au nord de la capitale pakistanaise Islamabad, dans une villa où il se cachait. Il a été tué d'une balle dans la tête par des membres des forces spéciales de la Marine américaine, les Navy Seals. Le commando était prêt à le capturer vivant s'il avait accepté de se rendre, a assuré un responsable américain.

Quatre autres personnes ont été tuées dans l'opération, mais aucun Américain n'a été blessé, a précisé une autre source, ajoutant qu'aucun prisonnier n'avait été pris.

L'ambassadeur du Pakistan aux États-Unis a annoncé lundi qu'Islamabad lancerait une «enquête complète» sur les ratés de ses services de renseignement dans leur traque d'Oussama ben Laden.

M. Brennan n'avait pas exclu peu avant que ben Laden ait pu recevoir l'appui de responsables pakistanais et avait révélé que les Etats-Unis n'avaient rien dit à Islamabad du raid contre le chef d'Al-Qaïda avant sa conclusion dimanche.

La secrétaire d'État Hillary Clinton a toutefois assuré que la «coopération» du Pakistan avait aidé les États-Unis à localiser le chef d'Al-Qaïda.

L'identité d'Oussama ben Laden a été confirmée par une analyse ADN du corps, selon un responsable américain.

Selon le récit d'un autre responsable, les services de renseignements ont localisé en août 2010 la résidence du chef d'Al-Qaïda à Abbottabad. La résidence occupait un terrain «huit fois plus grand que les autres maisons du quartier» et disposait de mesures de sécurité «extraordinaires» avec des murs hauts de 5,5 mètres.

Ben Laden y vivait sans internet ni téléphone. M. Obama a autorisé l'opération vendredi. Le raid, qui se voulait «chirurgical», a duré 40 minutes dans la nuit de dimanche à lundi.

Les minutes qui se sont écoulées pendant le raid ont été «longues comme des jours» pour Barack Obama et son équipe, qui suivaient les opérations en temps réel depuis la Maison Blanche, a raconté un proche conseiller du président.

Le chef d'Al-Qaïda, un de ses fils, deux de ses messagers et une femme ont été tués.

Selon M. Brennan, ben Laden a utilisé pour se protéger une femme comme «bouclier humain». Le commando était «prêt» à le capturer vivant s'il avait accepté de se rendre, a assuré un responsable américain sous couvert d'anonymat.

Mais «il a résisté pendant la fusillade. Par conséquent, les intervenants sur le terrain l'ont tué», a-t-il indiqué.

La dépouille de ben Laden a été jetée en mer depuis un porte-avions américain croisant au large des côtes pakistanaises, selon un responsable américain, notamment pour éviter qu'une éventuelle tombe devienne un lieu de pèlerinage.

Un fonctionnaire américain a assuré que tout avait été fait pour respecter «la tradition musulmane», mais un responsable de la mosquée égyptienne d'al-Azhar, la plus haute institution de l'islam sunnite, a souligné que l'islam était «totalement contre» l'immersion.

Les avertissements sur de possibles représailles se sont multipliées et plusieurs pays ont renforcé leurs mesures de sécurité.

Les États-Unis ont émis un bulletin d'alerte à leurs forces de l'ordre estimant que la nouvelle risquait de déclencher des représailles sur le sol américain et à l'étranger.

Le directeur de la CIA, Leon Panetta, qui a piloté l'opération d'élimination, a averti qu'il était «presque certain» que les partisans de ben Laden allaient chercher à le venger.

Le département d'État a appelé les ressortissants américains à la prudence à l'étranger.

La ministre de la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, a néanmoins précisé qu'aucune menace imminente d'attentat ne planait sur les États-Unis et que le pays ne relevait pas son niveau d'alerte.

L'annonce de la mort de ben Laden a été saluée par la communauté internationale, les capitales occidentales félicitant Washington pour sa «victoire», tout en rappelant que la fin de ben Laden ne signifiait pas la fin d'Al-Qaïda et de la lutte antiterroriste.

Le président français Nicolas Sarkozy a salué la «détermination» du président Obama face au terrorisme, et les deux présidents sont convenus de poursuivre «le combat juste et nécessaire» contre Al-Qaïda, selon un communiqué de l'Elysée.

Le Conseil de sécurité de l'ONU et le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, ont salué lundi un tournant dans la lutte contre le terrorisme.

Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a estimé que les opérations militaires de l'Alliance en Afghanistan devaient continuer, alors que le président afghan Hamid Karzaï a appelé les talibans à «cesser le combat».

Mais les talibans pakistanais alliés à Al-Qaïda ont juré de venger Oussama ben Laden, promettant d'attaquer des cibles américaines et le gouvernement d'Islamabad.

À Abbottabad, où ben Laden a été tué, les habitants n'ont pas tardé à émettre des doutes sur la présence et la mort d'Oussama ben Laden chez eux et à dénoncer, comme souvent au Pakistan, une «mise en scène américaine».

La Maison-Blanche a affirmé lundi ne pas avoir encore tranché quant à l'opportunité de diffuser des photos de la dépouille d'Oussama ben Laden, une mesure réclamée par des élus du Congrès américain pour servir de preuve face à l'opinion publique mondiale.