L'avocat du tueur norvégien Anders Behring Breivik a annoncé lundi qu'il appellerait des personnes issues des milieux islamistes, dont un mollah fondamentaliste, mais aussi des membres de l'extrême droite pour témoigner pour la défense pendant le procès à venir.

L'objectif, a expliqué Geir Lippestad, est de démontrer, conformément à ses souhaits, que Behring Breivik, qui avait tué 77 personnes le 22 juillet dernier, est pénalement responsable, contrairement aux conclusions de deux experts-psychiatres officiels qui l'avaient déclaré psychotique l'an dernier.

«Il faut voir si les experts qui ont évalué Breivik ont rejeté à tort ses pensées et ses opinions, notamment qu'une guerre est en cours (entre l'islam et l'Occident, NDLR) par exemple, en les considérant comme des hallucinations paranoïdes et une psychose», a expliqué M. Lippestad lors d'un point de presse.

«La question, c'est de savoir s'il existe bien des milieux, même petits, en Norvège qui sont du même avis. Ça peut avoir de l'importance pour la question de la responsabilité pénale», a-t-il ajouté.

Se voulant un idéologue en guerre contre «l'invasion musulmane» en Europe et le multiculturalisme, Behring Breivik souhaite être reconnu sain d'esprit afin, ont expliqué ses avocats, de ne pas invalider le message politique contenu dans le manifeste qu'il avait diffusé juste avant de perpétrer son carnage.

Lors du procès qui s'ouvrira le 16 avril, la ligne de défense consistera donc à plaider sa responsabilité pénale même si cela signifie qu'il est passible d'une longue peine de prison plutôt que de soins psychiatriques.

M. Lippestad a refusé de dévoiler les «30 à 40» noms contenus dans la liste des témoins que la défense va appeler à la barre, mais a confirmé que le mollah Krekar en faisait partie.

Fondateur du groupe islamiste kurde irakien Ansar al-Islam, ce religieux controversé établi en Norvège depuis 1991 vient d'être condamné par le tribunal d'Oslo à cinq ans de prison pour avoir proféré des menaces de mort et des appels au meurtre.

Le blogueur norvégien «Fjordman», un des mentors de Behring Breivik, sera aussi appelé à témoigner, a indiqué M. Lippestad, soulignant toutefois qu'il ne s'agissait pas de donner libre cours à l'exercice de «propagande politique» que son client semble souhaiter.

«Appeler des témoins venant de milieux extrêmes est important car nous pensons que les experts-psychiatres n'ont peut-être pas les connaissances nécessaires» pour dissocier extrémisme idéologique et désordre mental, a-t-il dit.

Parmi les témoins de la défense, l'accent sera mis sur des experts médicaux et des psychologues susceptibles de prouver que Behring Breivik est sain d'esprit, a-t-il d'ailleurs précisé.

Devant le tollé provoqué par la première expertise psychiatrique qui avait conclu l'an dernier que l'extrémiste souffrait de «schizophrénie paranoïde», la justice norvégienne a ordonné une nouvelle évaluation dont les résultats sont attendus le 10 avril.

En dernier ressort, il reviendra aux cinq juges du tribunal d'Oslo de trancher la question dans leur verdict attendu en juillet.

Le 22 juillet 2011, déguisé en policier, Behring Breivik avait fait feu pendant plus d'une heure sur un rassemblement de jeunes travaillistes sur l'île d'Utoya, près d'Oslo, après avoir fait exploser une bombe près du siège du gouvernement norvégien.