BP a dévoilé hier les conclusions d'une enquête interne sur la cause de l'accident survenu en avril sur la plateforme Deepwater Horizon, un document qui jette le blâme sur les sociétés sous-traitantes. Celles-ci ont aussitôt critiqué le contenu du rapport, qui donne un aperçu de la position légale que BP compte adopter face au déluge de poursuites civiles et criminelles auquel elle est exposée.

Dans le rapport, BP dit ne pas avoir déterminé «un seul facteur» à l'origine de l'explosion qui a coûté la vie à 11 employés, le 20 avril dernier. «Une série complexe de problèmes mécaniques, d'erreurs de jugement, d'ingénierie et des problèmes opérationnels ont convergé pour permettre une cascade d'accidents», y lit-on.

Les ingénieurs de BP disent partager une partie des responsabilités d'une seule erreur survenue sur la plateforme: la mauvaise lecture de tests de pression qui laissaient entrevoir un risque d'explosion.

«Selon notre rapport, il semble peu probable que le design du puits ait contribué à l'incident», a dit hier le patron de BP, Tony Hayward, par voie de communiqué. «En termes simples: nous croyons que le coulage du ciment a été mal réalisé.»

Ce sont les sociétés Transocean et Halliburton qui ont réalisé le coulage du ciment dans la plateforme Deepwater Horizon. Hier, un porte-parole de Transocean, Lou Colasuonno, a rejeté les accusations de BP.

«C'est un rapport opportuniste qui cherche à maquiller le facteur crucial à l'origine de l'incident: le design déficient du puits. À la fois dans le design et la construction du puits, BP a pris une série de décisions qui lui ont fait économiser de l'argent, des décisions qui ont fait augmenter les risques, dans certains cas, de façon sévère.»

Halliburton a fait savoir, hier, que le rapport contenait «des omissions et des erreurs». La société affirme qu'une déficience dans le design du puits conçu par BP est à l'origine de la catastrophe.

Des milliards en jeu

La question de la responsabilité n'est pas purement un débat rhétorique: le département de la Justice songerait à déposer des accusations criminelles dans le dossier.

Des accusations de négligence criminelle, par exemple, pourraient faire passer le total des amendes de 5 milliards à 18 milliards de dollars. Une commission présidentielle et des agences gouvernementales mènent actuellement des enquêtes indépendantes sur la catastrophe de Deepwater Horizon.

Le représentant démocrate du Massachusetts, Ed Markey, qui suit le dossier de BP depuis le début, a critiqué le rapport, qui n'a pas beaucoup de crédibilité, selon lui. «BP est prête à partager le blâme, pourvu qu'elle se retrouve avec le plus petit morceau», a-t-il dit hier.

La société a dit que l'apport des sous-traitants dans la préparation du rapport s'est avéré «limité». C'est donc dire que BP s'est surtout basée sur les témoignages de ses propres employés pour établir une version des faits. Les employés ne devaient pas prêter serment avant de rendre leur témoignage, lit-on dans le document.

Steve Gordon, avocat qui représente certains des survivants de la catastrophe de Deepwater Horizon, de même que la famille d'un travailleur mort dans l'explosion, s'est dit peu impressionné par la méthodologie qu'a employée BP pour produire son rapport.

«Prêter serment est un point important, car les gens qui ne sont pas sous serment peuvent donner des commentaires erronés, et aucun recours judiciaire ne peut être entrepris contre eux par la suite», a-t-il dit.

BP: LE BILAN

5 millions

Nombre de barils déversés.

5 à 18 milliards

Pénalités auxquelles BP fait face.

-20%

Baisse de la concentration en oxygène dans certaines zones duGolfe.