Plus de 80 jours après le début du déversement, BP croit avoir trouvé une solution pour capturer la majorité du pétrole qui s'échappe toujours du puits dans le golfe du Mexique. Sur place, l'accès aux zones sinistrées est devenu une infraction criminelle, une décision qui soulève la controverse.

BP est sur le point de lancer une opération visant à placer un entonnoir plus performant sur la fuite au fond du golfe du Mexique.

Cette opération délicate pourrait permettre à des navires de récolter 80 000 barils de pétrole par jour, un débit plus important que celui qui s'échappe actuellement du puits.

«L'opération complète va prendre environ de trois à quatre jours», a déclaré hier l'amiral Thad Allen, chef des opérations nommé par l'administration Obama. Les résultats seront connus lundi ou mardi.

La fuite ne serait pas «arrêtée», mais bien «contenue», a précisé M. Allen. La procédure n'est pas sans risque: pendant les quelques jours qu'il faudra pour changer d'entonnoir, le flux de pétrole qui se déverse dans la mer pourrait augmenter de 15 000 barils par jour. Environ 25 000 barils s'échappent quotidiennement du puits.

La Garde côtière, division de l'armée américaine, a signalé que les technologies employées proviennent du domaine aérospatial et n'ont jamais été testées à des profondeurs sous-marines aussi importantes.

Infraction criminelle

La question de l'accès aux zones sinistrées provoque des tensions entre les médias et BP depuis le début du déversement en avril.

Depuis la semaine dernière, la Garde côtière américaine interdit aux journalistes de se rendre à moins de 20 mètres des zones sinistrées où se trouve du matériel de contention. Les contrevenants sont passibles d'accusations criminelles et d'une amende de 40 000$.

Anderson Cooper, de CNN, a critiqué la mesure en ondes. «Dans les faits, si vous arrivez à une île où se trouvent des oiseaux englués dans du pétrole, vous n'avez plus le droit de vous approcher assez près pour prendre des images», a-t-il dit.

La journaliste Mac McClelland, du magazine américain Mother Jones, s'est souvent fait refuser l'accès aux endroits souillés.

Un problème qui ne fait qu'empirer, dit-elle.

«BP embauche des policiers qui ne sont pas en service pour patrouiller dans les zones sinistrées. Ils sont en uniforme, et ils sont imposants. Pour un journaliste, c'est intimidant», dit-elle en entrevue téléphonique.

Nettoyage en surface?

Après deux mois passés en Louisiane, Mme McClelland dit avoir une piètre opinion du travail de secours que fait BP. Les efforts de nettoyage sont insuffisants, et concentrés sur les zones les plus visibles du public, déplore-t-elle.

«Je suis allée en kayak dans des îles contaminées où il n'y a eu aucun effort de nettoyage. À l'île Grand Terre, réserve protégée où ont été prises les pires images des oiseaux englués, seulement 30 travailleurs sont à pied d'oeuvre.»

Des travailleurs lui ont confié avoir reçu l'instruction de ne récolter que le pétrole qui se trouve en surface sur les plages. «Or, si vous creusez un trou d'un pied dans le sable, vous allez trouver du pétrole. On ne le voit pas d'emblée, mais le pétrole est là.»